« Les Achuar traitent plantes et animaux comme des partenaires »
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Pourquoi avoir choisi de consacrer vos travaux d’anthropologue à l’Amazonie ?
Cette région du monde m’intriguait. J’avais lu les textes classiques : on écrit sur les basses terres de l’Amérique du Sud depuis que Christophe Colomb est arrivé chez les Taïnos ! Les chroniqueurs voyaient dans les Indiens soit des enfants du paradis – des « philosophes nus », comme disait Montaigne – menant une existence idyllique dans une forêt qui pourvoyait à tous leurs besoins, soit, au contraire, des brutes cannibales qui vivaient dispersées dans une forêt dont ils se distinguaient à peine. Dans un cas comme dans l’autre, il y a l’idée que ce sont des êtres « naturels ». Ils ne possédaient aucun des signes distinctifs auxquels pouvait se reconnaître une société moderne, telle qu’on l’entendait depuis la Renaissance : ils n’avaient ni pouvoir politique, ni religion, ni régime de lois. « Sans foi, sans loi, sans roi », disait-on en français à l’époque. Ils vivaient en habitat dispersé sur un très vaste territoire, ils n’avaient pas, ou peu, de groupes de filiation – clans ou lignages –, leurs chefferies étaient très peu marquées. Ce défaut d’institutions avait conduit à les considérer comme à peine plus que des animaux ou comme des « automates impuissants », selon l’expression de Buffon.
Longtemps, l’Amazonie a été l’enfer vert, le monde des coupeurs de têtes, des cannibales, des serpents et des araignées venimeuses. Cette vision terrifiante a commencé à se dissiper il y a une cinquantaine d’années pour être remplacée par la version idyllique : les Indiens sont tous des botanistes, des conservateurs de la nature… Ce qui m’intéressait, quand j’ai débuté mes recherches, c’est que ces deux visions se soient maintenues avec une telle constance chez des gens dont certains étaient des observateurs avisés. Il y avait une incapacité de la pensée européenne à appréhender des institutions qu’on ne parvenait pas à percevoir, parce qu’elles ne correspondaient à rien qui nous soit familier. Mon hypothèse avant de partir sur le terrain était que, si cette société nous semblait évanescente, c’était qu’elle était beaucoup plus ample qu’une simple association d
« Les Achuar traitent plantes et animaux comme des partenaires »
Philippe Descola
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