Le rôle des ressources humaines a-t-il évolué depuis votre entrée dans la profession, il y a vingt ans ?

Oui, indéniablement. À l’époque, on parlait plutôt de chef du personnel et notre mission était avant tout administrative. Aujourd’hui, le cœur de métier consiste à accompagner véritablement les salariés. Il ne s’agit plus uniquement de bien recruter, mais aussi de bien intégrer. Quand on embauche un nouveau salarié, on ne peut plus se contenter de lui faire signer des papiers, de lui indiquer la personne à contacter si besoin, et le laisser s’intégrer par lui-même. Une personne, lorsqu’elle intègre une entreprise, a besoin de sentir qu’elle entre dans un collectif de travail. Cela passe par une journée d’intégration, des attentions de bienvenue particulières, et de gros efforts au niveau du management intermédiaire. Nos managers sont bien davantage accompagnés aujourd’hui qu’ils ne l’étaient naguère pour accueillir cette nouvelle génération de travailleurs et répondre à leurs attentes professionnelles.

Quelles sont ces attentes ?

On constate un réel besoin de s’accomplir en dehors du travail. Le travail n’occupe plus une place structurante dans la vie des Français. Depuis la pandémie de Covid, la famille, les loisirs et les relations sociales sont devenus prioritaires, devant la carrière professionnelle. Ignorer cette réalité n’a aucun intérêt pour une entreprise. Il faut absolument réussir à la prendre en compte et la faire cohabiter avec la réalité de l’entreprise elle-même, qui n’est autre que de rester prospère dans un environnement qui ne s’y prête guère. C’est un travail d’équilibriste permanent.

« La pénurie de main-d’œuvre a changé la dynamique : l’entreprise s’adapte davantage au salarié » 

Comment vous êtes-vous adaptés, chez Faurie ?

Nous avons donné l’opportunité à des travailleurs qui le souhaitaient de passer à la semaine de quatre jours et nous avons mis en place la charte de télétravail pour les salariés du back-office (les services d’appui) et de l’administratif. Nous sommes aussi beaucoup plus attentifs aux problématiques personnelles et essayons de trouver des compromis. Ces préoccupations sont nouvelles ; elles se sont imposées après le Covid. La pénurie de main-d’œuvre a changé la dynamique : jusqu’à peu, le salarié s’adaptait à l’entreprise ; aujourd’hui, l’entreprise s’adapte davantage au salarié. Ce dernier, je le constate, n’en est pas moins engagé dans son travail, contrairement à ce que l’on peut souvent entendre. Simplement, il exige d’avoir une vie en dehors. Cette exigence n’avait jamais été, jusqu’à présent, un enjeu majeur pour les entreprises.

Ces nouvelles exigences font-elles évoluer le monde de l’entreprise positivement ?

C’est mon avis. Avant, les avancées sociales étaient très souvent dues à l’action de syndicats sur des groupes importants, ce qui amenait ensuite à légiférer. Désormais, une entreprise se vit davantage de l’intérieur. Celle dans laquelle nous avons mis en place la semaine de quatre jours compte 49 salariés et aucun représentant du personnel (du fait d’une carence de candidat aux élections). Les travailleurs nous ont fait part de leurs difficultés à payer leur carburant, pour certains la nourrice de leurs enfants, et de leur besoin d’économiser. Le passage à la semaine de quatre jours s’est fait en bonne intelligence, en discutant ensemble, sans qu’il y ait eu besoin d’un cadre particulier. Cette dynamique est, bien sûr, plus satisfaisante pour la DRH que je suis.

Quelle est, aujourd’hui, la principale difficulté à laquelle font face les services de ressources humaines qui cherchent à répondre aux attentes de leurs salariés ?

La plupart des associations de DRH vous le diront, la principale difficulté reste le recrutement : avoir des bras, qui soient immédiatement opérationnels. Si le recrutement ne constituait pas une si grande difficulté, nous pourrions nous consacrer davantage aux nouvelles attentes des salariés. Le défi est particulièrement grand dans notre secteur, en pleine mutation. Les mécaniciens de demain n’auront rien à voir avec ceux d’aujourd’hui, et c’est dans ce contexte aux problématiques multiples que les ressources humaines doivent tenir le cap désormais. 

 

Propos recueillis par MANON PAULIC

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