C’est en 1971, sous l’autorité de Jacques Chaban-Delmas, qu’est apparue pour la première fois la fonction de ministre de l’Écologie. L’intitulé était précisément « ministre délégué chargé de la protection de la nature et de l’environnement ». Ce portefeuille revint au gaulliste Robert Poujade – à ne pas confondre avec Pierre Poujade –, à une époque où l’écologie restait associée à la verdure et aux petits oiseaux. Trois ans plus tard, à la suite du premier choc pétrolier, on passa aux choses plus sérieuses. Un homme qui ne fut jamais ministre, agronome de formation, frappa les esprits pendant la campagne présidentielle ouverte par le décès de Georges Pompidou. Face aux caméras, empreint de gravité, René Dumont vida un verre d’eau en annonçant qu’un jour, cette eau vaudrait le prix du pétrole. La rareté des ressources naturelles entra dans l’imaginaire politique et collectif, mais la route s’annonçait longue et ingrate pour tous ceux qui auraient pour mission de défendre les couleurs de l’écologie. Certes, il y eut des hérauts et des héroïnes de la cause. De Michel Crépeau à Jean-Louis Borloo, en passant par Brice Lalonde – surnommé « Lalonde de choc » pour ses combats contre une agriculture polluante. De Ségolène Royal à NKM, en passant par Dominique Voynet ou Corinne Lepage. Des écolos pur sucre, ou pure algue, il y en eut un seul, qui ne fit pas long feu. Le navigateur Alain Bombard resta un mois dans le gouvernement Mauroy, avant d’être exfiltré pour avoir voulu supprimer la chasse à courre…

Avec Nicolas Hulot, le nouveau pouvoir en marche s’est assuré la participation d’une personnalité d’un autre calibre. L’homme est aimé des Français. Il n’est pas issu du sérail – même s’il a longtemps murmuré à l’oreille des présidents. Comme il le confie dans le long entretien qu’il nous a accordé, l’ancien animateur d’Ushuaïa est là « pour faire ». Faire, mais faire quoi ? On peut mettre à son crédit l’arrêt du projet de Notre-Dame-des-Landes ou l’interdiction d’ici trois ans du glyphosate – la France est le seul pays à suivre cette voie dans un délai si court. Mais à ce stade, pas une seule centrale nucléaire n’a fermé, malgré l’ancienneté et la dangerosité de certaines. La fin des pesticides n’est pas pour demain et le ministère de l’Agriculture a trop souvent le dernier mot. Au-delà des railleries qui n’épargnent pas le numéro trois du gouvernement, singé en avaleur de couleuvres, la question demeure : comment croire à son étoile verte quand on crie à l’urgence écologique, mais qu’on n’obtient d’engagements que sur des problèmes de long terme ? Keynes le disait en grinçant : « à long terme, nous serons tous morts. » 

Vous avez aimé ? Partagez-le !