La politique d’austérité menée ces ­dernières années en Grèce était-elle nécessaire ?

Le bilan des politiques d’austérité est catastrophique. Il y a cinq ans, le taux de chômage et le niveau de dette publique étaient les mêmes en zone euro et aux États-Unis. Depuis, le chômage a explosé dans la zone euro alors qu’il baissait aux États-Unis. On a voulu réduire les déficits trop rapidement, ce qui a conduit à la récession, et a augmenté à la fois le chômage et la dette publique. La priorité aujourd’hui est de rétablir la croissance.

Quelles seraient les bonnes orientations ?

Le plus important, à mes yeux, est d’expliquer qu’il n’existe pas de solution durable à la crise grecque sans revoir fondamentalement l’organisation de la zone euro. Il faut reprendre le traité budgétaire de 2012, remplacer les règles automatiques de réduction des déficits par un choix politique et démocratique du niveau des déficits, instaurer un impôt commun sur les sociétés, etc. Pour cela, il faut instituer un Parlement de la zone euro dans lequel chaque pays serait représenté en proportion de sa population, ni plus ni moins. Si la France et l’Italie soutiennent la Grèce dans le sens d’une refondation démocratique de la zone euro, alors l’Allemagne devra accepter un compromis.

Imaginons que la Grèce décide de ne pas rembourser sa dette.
Quelles seraient les conséquences de cette annonce ?

La Grèce est actuellement en situation d’excédent primaire, c’est-à-dire que les impôts payés par les Grecs sont supérieurs aux dépenses publiques dont ils bénéficient. Ce sont uniquement les intérêts qu’ils nous versent (environ 4 % du PIB chaque année) qui les mettent en déficit. Techniquement, les Grecs pourraient donc décréter un moratoire général et financer leurs dépenses tout seuls. Au cours de l’histoire, à chaque fois que l’on observe des dettes publiques aussi élevées, cela se conclut par un mélange de réduction de dettes, de restructuration ou d’inflation. Ce fut le cas, par exemple, en Allemagne après la Seconde Guerre mondiale – la dette dépassait 200 % du PIB, c’est plus qu’en Grèce aujourd’hui. Elle ne l’a jamais payée. 

La Grèce ne représente que 2 % du PIB de la zone euro. Donc, en cas de non-remboursement, les conséquences seraient limitées. Mais on ne peut pas se contenter de régler le cas grec isolément. Il faudrait mettre en commun l’ensemble des dettes publiques de la zone euro supérieures à 60 % du PIB, afin de permettre à tous les pays concernés de profiter d’un taux d’intérêt bas et de faciliter l’action de la Banque centrale européenne en vue de retrouver un taux d’inflation un peu plus élevé. 

Propos recueillis par ANNE-SOPHIE NOVEL

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