À quand remontent vos premières lectures de Zola ?

J’appartiens à une génération qui lisait beaucoup. L’offre à la radio se limitait à quelques stations, il n’y avait pas de télé. La lecture était notre principale source de connaissances et de plaisir. Comme de nombreux jeunes gens, j’ai plongé dans Zola. Il était plus proche de nos sensibilités que le grand Hugo. Zola, c’était différent. Par lui, vous pénétriez des passions qui étaient encore les nôtres : l’affrontement social, le combat politique avec la représentation de la classe ouvrière, à travers Germinal ; la dimension historique, à travers La Débâcle ; le triomphe de l’argent, avec le roman à ce nom justement, et avec La Curée, admirable, qui nous dévoilaient des aspects méconnus de cette société. Et enfin, il y avait le génie de l’écrivain.

Comment définiriez-vous ce génie ?

Qu’est-ce qui fait que vous aimez un auteur ? C’est qu’à vos yeux, il dit exactement ce que vous souhaiteriez dire, sans que vous sachiez le formuler. Zola avait ce génie. Quand vous aviez 18-20 ans, à l’époque, vous plongiez dedans, au risque de négliger vos études et les obligations qu’elles réclamaient ! J’avais avec Zola une liaison passionnée. Je n’étais pas le seul. Nous confrontions nos opinions dans la cour du lycée, puis à la Sorbonne. À la Faculté des lettres, on admirait Zola ; à la Faculté de droit, moins.

Quel livre de Zola vous a particulièrement marqué ?

Je trouve prodigieux de ressusciter le mouvement ouvrier naissant et en même temps le monde de la finance et de la spéculation immobilière. Peut-être était-ce une passion que j’attribuais à Zola : j’ai toujours trouvé que Nana était un grand roman d’amour pour les femmes. À l’époque, c’était avoué. Aujourd’hui, Zola serait percé de flèches par les féministes de choc. Quand Nana est à Longchamp, et que la pouliche qui porte son nom court et gagne, c’est merveilleux… Et la fin du roman, quand Nana agonise en même temps que

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