Qui aurait imaginé il y a seulement quelques mois l’Arc de Triomphe emballé ? Ce sera chose faite du 18 septembre au 3 octobre. Le sculpteur Christo, disparu voilà un an et demi, n’avait cessé de travailler à ce projet, multipliant esquisses et dessins depuis des décennies. L’Arc, avec son architecture puissante, était devenu son obsession depuis l’empaquetage réussi du Pont-Neuf en 1985. L’un des monuments les plus célèbres de France sera donc entièrement drapé d’une étoffe aux teintes d’argent bleuté. Un défi technique à multiples facettes : cette œuvre éphémère a demandé 25 000 mètres carrés de tissu recyclable en polypropylène et 3 000 mètres de corde rouge ; sans compter des cordistes et des techniciens particulièrement doués pour empaqueter et ficeler ce monstre de pierre.

Autant le projet du Pont-Neuf avait suscité de multiples contestations, autant celui-ci semble consensuel. C’est le Centre Pompidou qui l’a lui-même présenté au Centre des monuments nationaux avec le soutien de la Ville de Paris. Ce qui était perçu comme scandaleux est devenu un événement attendu et espéré. C’est que, contrairement à 1985, Christo n’est plus un inconnu. Le Pont-Neuf lui a assuré une notoriété hors norme, et Beaubourg lui a consacré il y a deux ans une rétrospective où l’on pouvait constater tout à la fois les talents du jeune artiste dès les années 1960 et sa maîtrise exceptionnelle du dessin et de l’espace.

Ce hors-série du 1 des arts se propose de raconter et d’analyser l’aventure esthétique de cette figure de l’art contemporain. La sociologue Nathalie Heinich nous permet de mieux comprendre les contours et les défis de son œuvre : la priorité donnée à la transgression, à l’éphémère et à l’emballage de monuments ou de paysages sans avoir jamais recours à de l’argent public. L’historien de l’art Thomas Schlesser présente et commente huit de ses œuvres les plus marquantes. Enfin Maxence Collin retrace l’itinéraire de Christo (1935-2020), de sa Bulgarie natale à son installation définitive à New York après une longue escale parisienne. Une vie d’artiste poussant toujours plus loin les limites, formant avec sa femme Jeanne-Claude Denat de Guillebon (1935-2009) un couple inséparable. Lui dessinant, elle matérialisant ses rêves en dirigeant une véritable entreprise dédiée à l’œuvre commune.

L’Arc de Triomphe drapé d’argent bleuté sera leur dernier coup de maître. Post mortem ! 

Vous avez aimé ? Partagez-le !