Alors que se profilent les vacances d’été, nous avons voulu éclairer la relation singulière, et aujourd’hui dégradée, qui unit le Maroc et la France. Destination touristique privilégiée des Français, dont la communauté sur place (51 000 ressortissants) est la plus importante d’Afrique, le royaume chérifien occupe une place à part dans notre imaginaire comme dans le lien historique et géographique de notre pays avec le Maghreb. Au-delà des clichés qui ont leur réalité – le soleil, la beauté des villes, des plages ou des paysages de l’Atlas, le coût de la vie 40 % moins élevé qu’en France, la cuisine raffinée, les avantages fiscaux, une certaine douceur de l’existence, une langue en partage même si l’anglais progresse, etc. –, le Maroc n’est pas seulement un havre pour retraités français ou une opportunité d’emploi pour les jeunes de l’Hexagone travaillant dans le millier de PME françaises installées sur place. Entre nos deux pays, le temps a fait son œuvre, dessinant des méandres complexes que résume bien cette formule gainsbourienne : « Je t’aime, moi non plus. »

La fin du protectorat, en 1956, marqua le début d’une nouvelle ère placée sous le signe de l’amitié et de la coopération.

Si on remonte ce fil chronologique, on ne trouve pas au départ une colonisation de peuplement mais ce mot ambigu de protectorat, un régime installé en 1912 et incarné par la figure du militaire Hubert Lyautey, devenu premier résident général au Maroc après s’être engagé dans la colonisation du pays. Si les poussées indépendantistes se manifestèrent parfois violemment, comme pendant la guerre du Rif (1921-1926) ou lors des émeutes de Casablanca (1952), l’élan nationaliste ne se solda pas, comme en Algérie, par un bain de sang. La fin du protectorat, en 1956, marqua le début d’une nouvelle ère placée sous le signe de l’amitié et de la coopération. Un moment qui ne fut pas dénué de tensions, par exemple en 1965, au moment de l’enlèvement de l’opposant Mehdi Ben Barka par des hommes de main français puis de son assassinat par des agents de la sécurité marocaine, ou plus tard lors de la parution de Notre ami le roi, un livre enquête dévastateur de Gilles Perrault sur Hassan II, qui fut interdit au Maroc et vécu comme un séisme.

Une succession de sourdes querelles, d’incompréhensions, de comportements vécus comme vexatoires de part et d’autre, entre le Palais royal et le palais de l’Élysée.

Aujourd’hui, pas d’éclats de voix, mais une succession de sourdes querelles, d’incompréhensions, de comportements vécus comme vexatoires de part et d’autre, entre le Palais royal et le palais de l’Élysée. Tahar Ben Jelloun estime que le président français ne comprend rien à la monarchie marocaine. Emmanuel Macron, lui, garde un goût amer d’avoir été écouté par le logiciel espion Pegasus actionné depuis le Maroc. Que se passe-t-il exactement ? Une histoire de famille, que nous raconte avec une grande finesse Leïla Slimani. 

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