En ce temps-là, les choses étaient simples. Il y avait le Bien d’un côté et le Mal de l’autre. Le Bien, c’était « nos valeurs ». Le Mal, c’était le racisme, l’antisémitisme et le populisme, incarnés par un odieux personnage, Jean-Marie Le Pen, qui avait le mérite de nourrir régulièrement notre indignation par de petites phrases scandaleuses. Son parti, entouré d’un cordon sanitaire, était hors jeu, sinon hors la loi. Malheur à qui abordait une question exploitée par lui ! Un grand prêtre se levait aussitôt, la moustache tremblante, pour dénoncer « la lepénisation des esprits ». Tout sujet traité par le Front national, à commencer par la nation, était décrété par nos maîtres à penser médiatiques propriété exclusive du Front national. Seuls des néopétainistes, appartenant à une France moisie, pouvaient s’y intéresser. Pour le reste, tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes multiculturels. On avait seulement besoin de créer des emplois et de fustiger le fascisme.

Hélas ! Les forces du Mal, attirées par le pouvoir, se sont parées de nouveaux habits, bleu marine. Et d’autres acteurs ont fait irruption sur la scène avec, cette fois, des fusils-­mitrailleurs. Pour dénoncer cet ennemi redoutable qui se réclame d’Allah et tire dans le tas, nous cherchons encore nos mots, en regrettant le temps où tout était simple et clair. Nos repères se brouillent. Nous nous sommes mis à chanter La Marseillaise, nous, les bobos, toujours bien-pensants, bien nourris et bien logés, à l’écart des ghettos que nous avons laissé prospérer. 

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