Deux idées fausses sur l’identité
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Deux idées récurrentes structurent la pensée qui, de l’identité malheureuse aux théories du « Grand Remplacement », nourrit les angoisses identitaires de nos concitoyens et la montée du FN. La première postule l’existence d’une identité nationale cohérente, homogène, historiquement enracinée, structurée autour de pratiques culturelles distinctes, qui serait progressivement subvertie par des identités minoritaires invasives et prosélytes.
Disons-le clairement : une telle identité est en France introuvable. Il n’existe pas une identité française unique qui aurait traversé l’histoire pour parvenir jusqu’à nous. Au contraire, plusieurs récits identitaires concurrents, porteurs de fragments d’histoire et de mémoire nationales, coexistent. Pour le meilleur et pour le pire, les récits nationaux hégémoniques ont été balayés depuis près d’un demi-siècle, rendant illusoire une définition de « notre » culture qui soit acceptée par tous. D’où l’échec patent du débat sur l’identité nationale lancé en 2009 sous la présidence de Nicolas Sarkozy. On ne peut définir ce qui par nature est multiple et contradictoire. Plutôt que de s’arc-bouter sur la recherche d’une identité nationale, l’appréhension des identités françaises, mobiles, en changement constant, enrichies d’apports multiples – cultures régionales, immigrées, européennes, mondialisées –, devrait être envisagée sans exclusive ni volonté de figer ce qui par essence ne peut pas l’être.
Seconde idée fausse : le métissage serait incompatible avec la préservation d’une culture originale propre aux sociétés qui se « protègent » de l’extérieur. Concevant la rencontre des cultures et des modes de vie sur le mode de l’affrontement et non de l’hybridation, cette perception pose problème. Elle essentialise, voire ethnicise la culture française en la présentant comme « pure » à l’origine, passant sous silence le fait que cette dernière est le produit d’un métissage constant depuis des siècles. Ce qui perdure dans une société, c’est un ensemble de valeurs – tolérance, goût de la liberté, espoir d’une égalité à parfaire – adossé sur un patrimoine visible. Le reste ne constitue qu’un compromis historique forcément instable et temporaire.
Si tant est que le métis n’est pas sommé en permanence de choisir entre ses origines multiples, rien d’incompatible entre le mélange et l’appartenance à une communauté culturelle donnée fondée sur des références communes fortes et préservées. De nombreuses études sociologiques prouvent que la multiplicité des appartenances identitaires a tendance à favoriser chacune d’entre elles individuellement et non pas l’une au détriment des autres.
Notre culture nationale formée de ces identités multiples n’a donc pas de soucis à se faire pour elle-même. Elle est bien vivante, ouverte par nature, structurellement diverse et forte de valeurs partagées. Le métissage fait son œuvre dans notre pays, creuset d’immigration depuis des siècles. Ce qui est à craindre en vérité, ce sont les assignations identitaires et la quête désespérée d’une identité nationale unique et figée. Ce mouvement, à défaut d’abîmer notre identité, est lourd de conséquences politiques pour notre modèle démocratique et nos libertés.
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