Le legs de Prométhée
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J’aime mieux raconter les malheurs des humains.
Ils étaient des enfants, j’en ai fait des adultes.
Je ne les juge pas mais c’est la vérité.
Voilà de quoi, je pense, ils me sont redevables :
Ils regardaient sans voir, écoutaient sans entendre
Comme un songe, ils vivaient dans une vie absente.
Ils ne construisaient rien ni en bois ni en pierre,
Ils vivaient sous la terre comme des fourmis grouillantes,
Éloignés du soleil dans des grottes obscures.
Ils étaient incapables de prévoir les hivers,
Ni le printemps en fleur, ni l’été des récoltes,
Ils agissaient sans conscience de leurs actes
Jusqu’au jour où je leur ai livré les secrets
Du lever et du coucher des astres,
La science suprême du nombre,
L’écriture, mémoire et mère des arts.
Pour leur épargner les travaux trop lourds,
J’ai mis les bêtes à cornes sous le joug,
Et les chevaux qui font la richesse et l’orgueil.
Et j’ai fait les bateaux qui sillonnent les mers.
Et moi qui pour les hommes ai conçu tout cela,
Je ne peux aujourd’hui me libérer moi-même.
Prométhée enchaîné, traduit en français par Olivier Py dans La Trilogie de la guerre suivi de Prométhée enchaîné © Actes Sud, 2012
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