Leur apprendre à lire, à écrire et à nous raconter des histoires…
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J’ai lu Comme un roman avant de devenir prof et mère. D’après Daniel Pennac, il fallait continuer de lire des histoires aux enfants grandis. J’ai adoré sa proposition, et quand le moment est venu, j’ai continué. À leur en lire à voix haute, à les écouter lire aussi, des livres ou leurs propres textes.
J’ai peu de certitudes en matière d’enseignement, mais j’ai toujours insisté, en cours et avec mes enfants, sur les liens tissés par les textes entre l’auteur et le lecteur. L’auteur enfermant images, sensations, émotions dans un texte – origami, feuilletage, diable dans la boîte – et le lecteur dépliant tout cela dans son esprit et offrant sa sensibilité, sa rêverie, sa voix à la partition proposée.
Toute lecture est une interprétation. Toute écriture est pleine de trous. La partition peut être plus ou moins dirigiste. L’écart est très net entre le poème et la nouvelle à chute.
Initier les enfants au plaisir de lire, leur apprendre à interroger l’alchimie des plis d’un texte et les encourager à s’essayer à l’écriture me paraît essentiel.
On écrit le plus souvent pour un autre. Même l’écriture intime offre une prise de distance par rapport à soi-même : nous sommes l’autre, celui qui, prêtant l’oreille au jaillissement, lui donne forme. L’auteur devient son propre lecteur, dès qu’il accepte de se relire, de se reprendre. Même les surréalistes l’ont fait.
Écrire est un joli moyen de réaliser la part de l’autre.
J’ai toujours poussé mes collégiens à se lire les uns les autres, silencieusement ou à voix haute, à parler autour de leurs écrits. Il y a cette solitude de l’écriture, puis ce moment de partage, tellement émouvant et jubilatoire, qui leur permet de comprendre les écarts entre leurs intentions et ce que leur production devient dans l’esprit de leurs lecteurs.
Quant à la peur, celle de la page blanche, celle du texte lu par l’autre, elle n’est plus un obstacle dès qu’on l’accepte comme un ingrédient de la création.
Peur et plaisir sont intimement liés dans l’acte d’écrire. Ils en sont le frisson.
À nous d’accepter d’être, quand l’enfant nous propose un texte, son lecteur – l’autre, celui qu’il s’agit d’embarquer, de surprendre, de faire vibrer.
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