Singapour parie sur la ferme urbaine verticale
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Imaginez une exploitation agricole composée de 120 tours en aluminium de 9 mètres de hauteur. Une ferme implantée en ville où les légumes se passent de terre pour pousser. Agri-fiction ? Non, c’est l’idée de Jack Ng, 52 ans, qui a créé Sky Greens, la première ferme verticale de Singapour, en octobre 2012. L’ingénieur singapourien a développé une technologie très innovante : grâce à un système rotatif, des bacs remplis de semis et de légumes montent vers la lumière, puis redescendent puiser des nutriments dans des bacs remplis d’eau et de substrat.
Ce n’est pas un hasard si Sky Greens a vu le jour ici, à Singapour, petit confetti de 718 kilomètres carrés pour 5,5 millions d’habitants, l’une des métropoles les plus denses au monde où les tours de béton poussent plus facilement que les légumes. Pour nourrir ses habitants, Singapour doit recourir massivement aux importations. En provenance de 35 pays différents, elles représentent plus de 90 % des besoins alimentaires de la ville.
Les fermes verticales pourraient donc bien être l’une des réponses pour diminuer la dépendance vis-à-vis de l’extérieur et développer l’agriculture locale malgré les contraintes d’espace. Sky Greens produit jusqu’à une demi-tonne de légumes frais par jour sur un espace de 3,65 hectares où s’activent 21 agriculteurs. Sur une exploitation horizontale, il faudrait un terrain dix fois plus vaste et deux fois plus de main-d’œuvre pour obtenir des résultats identiques. Avec ces légumes produits localement dans un environnement maîtrisé, utilisant moins de pesticides que dans une exploitation classique, Jacques Ng a su convaincre FairPrice, l’une des principales chaînes de supermarchés de la cité-État, et un nombre grandissant de consommateurs. Si les légumes sont légèrement plus chers que ceux qui arrivent de l’extérieur, l’argument de la fraîcheur séduit les clients. « Les légumes viennent en général de Malaisie, il faut compter environ trois jours entre le moment où les légumes sont récoltés et leur mise en rayon, explique Jack Ng. Nos légumes arrivent en supermarché dans la journée, au plus tard le lendemain matin. »
Aujourd’hui Sky Greens fournit environ 1 % des besoins de l’île en légumes verts. C’est encore une goutte d’eau mais les initiatives se multiplient et Singapour voit germer une nouvelle génération de pionniers alliant agriculture et innovation, en quête de solutions pour limiter la dépendance alimentaire. Sur le toit d’un immeuble d’Orchard Road, la principale artère commerçante de Singapour, Allan Lim cultive sur 600 mètres carrés basilic, menthe poivrée, laitues, mais aussi tomates, courgettes, aubergines et même potimarrons. Il y a tout juste un an, avec cinq partenaires, cet entrepreneur a créé Comcrop. « À Singapour, nous manquons de place, les toits peuvent être de formidables espaces à convertir pour l’agriculture », explique Allan Lim.
À la différence de Sky Greens qui utilise l’hydroponie, Comcrop fait appel à l’aquaponie. Cette technique innovante lie production animale en milieu aquatique et production des plantes. L’exploitation fonctionne comme un mini-écosystème dans lequel on trouve d’un côté l’élevage de poissons, de l’autre une culture maraîchère hors-sol, et entre les deux des bactéries et un système de pompes pour réguler l’eau. Aujourd’hui Allan Lim récolte chaque jour 3,5 kilogrammes d’herbes aromatiques qu’il vend aux chefs cuisiniers et à certains sites en ligne spécialisés. Mais ce chef d’entreprise voit grand. D’ici 2016, il compte ouvrir une nouvelle ferme sur le toit de plus de 4 000 mètres carrés pour assurer l’approvisionnement des entreprises agroalimentaires. Pour encourager les innovations et la recherche dans le secteur agricole, l’AVA, l’autorité agroalimentaire et vétérinaire de Singapour, a créé en 2014 un fonds doté de 43 millions d’euros sur cinq ans.
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