L’évolution du peuplement humain, notamment dans les villes et les campagnes, intéresse très étroitement l’ONU, qui depuis 1988 compulse au niveau mondial les statistiques permettant de suivre ces tendances. Publiés l’année dernière, ces chiffres attestent d’un vaste mouvement mondial d’urbanisation : alors qu’une personne sur dix vivait en ville en 1900, plus de la moitié de la population (54 %) est aujourd’hui urbaine. Quant aux campagnes, leur peuplement ralentit et devrait atteindre un maximum prochainement (3,4 milliards), avant de décliner progressivement dans les prochaines décennies (3,2 milliards en 2050).

L’Afrique et l’Asie contribuent largement à cette tendance, avec une population urbaine encore minoritaire (respectivement 40 % et 48 %), mais en croissance rapide. Les projections démographiques prévoient que ces deux continents produiront, d’ici 2050, neuf fois plus d’urbains que le reste du monde : à cet horizon, 2,5 milliards de nouveaux urbains en Afrique et en Asie, ainsi que 300 millions ailleurs vont venir s’ajouter aux 3,9 milliards actuels.

Ces chiffres attestent de l’importance croissante des villes. Et si ce constat est largement admis, sa mesure est de plus en plus discutée à cause des transformations profondes qui, dans le même temps, ont redéfini les espaces ruraux et urbains. Par endroits, les villes inventent une morphologie moins densément peuplée et plus verte, assimilable par certains aspects à la campagne ; à l’inverse, les campagnes – comme dans certaines régions de Chine et d’Inde – se sont peuplées au point de présenter une densité similaire à certaines villes européennes. 

Ville (urbaine) et campagne (rurale) deviennent des notions de plus en plus problématiques, obligeant notamment l’ONU à renoncer à en proposer une définition harmonisée. Espaces semi-urbains, villes diffuses, Zwischenstadt, villes-campagnes, tiers espaces… Autant de néologismes qui fleurissent pour tenter de saisir ces zones grises de plus en plus nombreuses, et témoignent de la nécessité de revoir le cadre de pensée dans lequel les termes de ce débat sont posés. Car si une tendance profonde est bien à l’œuvre, il est manifeste que les outils manquent pour l’observer dans sa complexité. 

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