La tour Eiffel est-elle une grande entreprise touristique ?

Elle est un phare. Paris est le point d’entrée de la majorité de ceux qui visitent la France, et ils sont aspirés, fascinés par la tour Eiffel. La tour Eiffel est, et sera encore plus demain, l’avant-garde du tourisme parisien.

Au niveau économique, cela se traduit par la commercialisation de billets, des ventes de produits complémentaires, de la visibilité autour de l’image de marque, un site Internet avec un fort trafic. Six à sept millions de personnes par an visitent la tour Eiffel, et puis il y a tous ceux qui la regardent scintiller le soir, cinq minutes au début de chaque heure.

Et pourtant la tour Eiffel exerce son métier touristique d’une manière assez singulière, un peu solitaire. La demande de billets dépasse l’offre de façon structurelle, car en fait la tour est toute petite ! L’espace d’accueil fait 6 000 mètres carrés, rien de comparable à la surface des salles du château de Versailles, par exemple, qui reçoit pourtant sensiblement le même nombre de visiteurs. L’accès est difficile si l’on veut emprunter l’un des trois ascenseurs qui, depuis cent trente ans, font monter les visiteurs aux 1er et 2e étages. La tour est le bâtiment le plus visité au monde et, quand on y pense, il n’y a rien à l’intérieur ! Tout est dans les creux, les pleins, les vues, les évocations symboliques. Roland Barthes a écrit un texte magnifique sur le pouvoir onirique de ce lieu.

Dire que c’est un des trésors de la Ville de Paris, est-ce exagéré ?

C’est vrai à plusieurs titres. En termes d’image, d’animation, la tour prend toute sa place pour accompagner la Ville de Paris dans ses célébrations – de fête ou parfois de deuil. Et en termes économiques, bien sûr : la Société d’exploitation de la tour Eiffel (SETE) rapporte de l’argent. Ses ressources proviennent de la vente des billets et des produits consommés sur la tour – restauration, boutiques. Et du côté des dépenses, nous prenons en charge l’ensemble des coûts d’exploitation, une masse salariale assez importante et tout l’entretien du bâtiment. La SETE a trois champs de responsabilité : l’accueil du public, le pilotage de la marque au niveau mondial et enfin la pérennité du bâtiment. Nous avons la responsabilité de financer aussi bien la maintenance courante que les grands travaux, tout en versant une redevance au propriétaire du bâtiment, la Ville de Paris – 8 à 10 millions par an ces dix dernières années.

Cette mission nous est conférée à travers un contrat de délégation de service public, lequel vient de nous être renouvelé pour quinze ans. Nous avons présenté un plan de rénovation de 300 millions qui a été voté à l’unanimité par le Conseil de Paris : il n’y a pas d’enjeu politique autour de la tour Eiffel. Nous sommes entrés, depuis fin 2017, dans une phase de très gros travaux, lesquels doivent être terminés pour les Jeux olympiques de 2024, la date magique. Ensuite, les investissements les plus lourds auront été réalisés, la redevance devrait atteindre des montants très importants, de l’ordre de 40 millions d’euros par an.

Dans le même temps, tout l’accueil et le parcours des visiteurs vont être profondément repensés. Dès le 1er juillet de cette année, la part des billets vendus sur Internet sera portée à 50 %, ce qui devrait réduire le temps d’attente. Tout sera fait pour améliorer la qualité de la visite : la restauration (notamment en privilégiant les produits issus de circuits courts d’approvisionnement), les visites guidées par des salariés qui connaissent la tour comme leur poche, le Wi-Fi, le bar à champagne… La tour est magique, mais la qualité de la visite pouvait parfois être décevante. C’est cela que nous travaillons à améliorer. 

 

Propos recueillis par SOPHIE GHERARDI

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