Doit-on simplifier le droit du travail, le faire maigrir, le rendre compatible avec le fonctionnement – ou les dysfonctionnements – d’une société en voie accélérée de libéralisation ? À l’évidence, deux conceptions du lien social s’affrontent. La première, héritière des luttes anciennes des travailleurs, réclame de la protection. La seconde, orpheline de la croissance, réclame de la souplesse. Ce débat est un combat aussi juste que complexe, car s’il ­s’attaque aux effets réels du mal, il n’en traite pas forcément la cause.
Il convient assurément d’éclaircir ce qui reste obscur dans le luxuriant maquis juridique, comme le suggèrent avec force Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen. Mais l’allègement de la norme peut-il suffire à lever les blocages imputés au gros livre rouge ? Crier haro sur le Code du travail, c’est reconnaître que la loi, avec ses penchants à se mêler de tout, serait un frein à l’économie. Mais pourquoi a-t-on autant légiféré ? S’il y a trop de droit, c’est qu’il n’y a pas assez de confiance. L’expression « partenaires sociaux » est un pieux mensonge car on ne connaît pas si âpres adversaires que les syndicats et les patrons, et que les syndicats entre eux, sur fond de représentativité affaiblie. Ce qui nous manque, c’est une culture de la négociation, du compromis, dans le respect des intérêts vitaux et bien compris de chacun. Si la loi est bavarde, il y a une raison. Son silence fait toujours le lit de la défiance. 

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