Quel but assigne-t-on à la loi ? C’est le fond du débat. Le législateur lui donne la puissance – à mon avis imaginaire – de réduire le ­chômage. Le patronat considère que la situation de sous-emploi est la conséquence des règles trop contraignantes du droit du travail. Il exige moins de contraintes pour les entreprises afin de les désangoisser face à l’embauche. Mais ce n’est pas parce qu’on divorce plus facilement qu’on se marie plus facilement ! Le fait que le salarié soit suffisamment protégé est aussi une condition de la qualité de son travail. 

Le rapport Combrexelle souhaite donner aux négociations collectives une large place. Mais les organisations syndicales sont affaiblies par la situation de l’emploi. Dans ce contexte, les normes négociées seront forcément déséquilibrées et moins acceptées par les salariés. Cela risque de générer un émiettement de la loi, une mauvaise qualité de la norme et par conséquent un recours aux commissions d’interprétation. Sous couvert de simplification, il y a en fait un amoindrissement de la protection des salariés dans l’emploi qui sera une source évidente de contentieux, car l’application de la norme posera d’autant plus problème. En effet, si celle-ci diffère d’une entreprise à l’autre, cela va générer un vrai désordre.

Robert Badinter et Antoine Lyon-Caen développent une autre vision de la « simplification ». Ils questionnent à raison la pertinence des dérogations car elles finissent par nuire à l’efficacité de la règle. Pour que les PME et les partenaires sociaux puissent appréhender le Code du travail avec plus d’efficacité, il faudrait peut-être le débarrasser de certains développements qui ne relèvent pas de son objet, à savoir : régir les relations entre employeurs et salariés. Il est pollué par beaucoup d’exceptions, de dérogations. On confond le Code du travail avec un code de l’emploi. Là, il s’agit d’un débat de fond et d’un projet de société. 

 

Propos recueillis par ELSA DELAUNAY

 

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