L’été 2019 nous a fait assister à de l’inédit : le mois de juillet a été classé mois le plus chaud jamais mesuré dans le monde tandis qu’en août, l’Islande procèdait à un geste spectaculaire de commémoration d’un des plus grands glaciers d’Europe, désormais disparu de son territoire.

La question climatique est une question phare de cette rentrée. Son intensité s’est accrue grâce aux efforts des acteurs sociaux pour la rendre publique. Son acuité est aujourd’hui renforcée par l’expérience que nous en faisons, qui fait sortir les chiffres de l’abstraction et leur donne une réalité tangible. Le climat se vit à fleur de peau dans ces épisodes caniculaires qui ont perdu leur caractère exceptionnel – moments éprouvants de réorganisation des modes de vie, de travail, de transport, moments d’ébranlement des corps et de réveil de fragilités oubliées. Le changement climatique n’est plus seulement un chiffre, une courbe, ni même un thème du cinéma engagé ou de la littérature catastrophiste (on se souvient que l’astronome, romancier et vulgarisateur Camille Flammarion avait publié en 1894 un roman annonciateur du genre, intitulé La Fin du monde), il est devenu une véritable expérience individuelle et collective.

Dans l’histoire de la préoccupation environnementale, le climat tient aujourd’hui une place centrale, éclipsant quelque peu les problèmes de pollution et de biodiversité. Au cœur d’une discussion mondiale sur les conditions de vie sur Terre, il a cessé d’être une question scientifique au long cours, éloignée de nous. Il n’est plus envisagé dans la perspective du temps long ni indépendamment des activités humaines. Il devient notre affaire, ici et aujourd’hui, affaire de degrés devenue affaire du siècle, mobilisant des questions morales (interrogeant les conditions de la vie humaine), politiques (mise en avant de principes de justice et de solidarité), économiques (mise en question des modèles de croissance) et esthétiques (saccage ou disparition des paysages).

Il n’y a pas de problème public en soi mais des problèmes devenus publics, sous l’effet de l’intervention de groupes d’acteurs qui se les approprient et les façonnent, chacun à sa manière. La question climatique est marquée autant par la convergence que par la divergence : convergence des publics qui s’en emparent et la placent au centre, divergence des analyses et des préconisations. Elle est structurée par un mouvement à la fois centripète (qui rassemble) et centrifuge (qui distend et divise). L’accord et le désaccord sur ce sujet sont en balance permanente, reposant sur l’imbrication subtile du savoir et du vouloir, de l’

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