À quoi riment les Nations unies ? Ses Casques bleus sont incapables de garantir la paix. Ses experts médicaux ne savent pas gérer les crises – la preuve avec Ebola. Les guerres civiles en Syrie, en Ukraine, au Sri Lanka ou en Libye sont autant de signes de son impuissance. Ses missions les plus décisives – réfugiés, famines, désastres – souffrent du manque d’argent, tandis que ses bureaucrates à New York et Genève s’offrent des salaires à six chiffres sous prétexte qu’ils supervisent des échecs en série.

C’est un bien triste bilan pour cette organisation qui dépense 40 milliards de dollars par an, et devrait être un gendarme international, un gouvernement mondial, l’autorité médicale ultime, et bien d’autres choses encore. Les Nations unies fêteront leur soixante-dixième anniversaire à la fin du mois. Nous pourrions plaisanter : comme chez la plupart des vieillards, plus rien ne fonctionne. 

Mais dans un monde sur lequel pèse la menace de conflits, de la corruption, d’une catastrophe climatique, couper les vivres des Nations unies ne suffira pas. Malgré ses mauvaises performances, l’ONU est plus que jamais nécessaire. Il suffirait qu’elle entreprenne quelques réformes simples pour devenir crédible aux yeux du monde. 

À commencer par le Conseil de sécurité. Il a été mis en place pour maintenir l’ordre dans le monde tel qu’il existait en 1945. Ce monde a changé. Le droit de veto exercé par les cinq membres permanents – la Grande-Bretagne, la France, la Chine, la Russie et les États-Unis –embourbe l’ONU dans l’indécision. Imaginez cinq membres d’une famille dysfonctionnelle qui essaieraient de choisir quel programme regarder à la télévision. Les pouvoirs émergents commencent à voir d’un mauvais œil leur exclusion du club autoproclamé des cinq. 

Le Conseil doit refléter le monde moderne et ses exigences. Augmenter le nombre des nations – pourquoi ne pas passer à vingt-cinq ? –, pouvoir prendre des décisions, en particulier concernant les génocides et les catastrophes humanitaires, les soumettre à un vote à la majorité qu’aucun veto ne puisse remettre en cause.

Ensuite, il y a la question du maintien de la paix. L’ONU doit avoir, et ce de manière permanente, une armée de professionnels du maintien de la paix pouvant être envoyés dans des missions d’intervention plus offensives, et opérant explicitement sous son autorité. Bien les payer et leur offrir un détachement au sein de leur armée nationale quand ils reviennent au pays. En contrepartie : poursuivre ceux qui violent, maltraitent ou tuent. Faire de cette force une unité véritablement crainte par les tyrans.

Il y a également des branches de l’ONU qui ont besoin de plus de ressources. L’UNHCR et d’autres agences humanitaires doivent faire l’aumône pour financer leurs missions urgentes – comme la crise migratoire. Au même moment à New York, les bureaucrates savourent un budget garanti de 5 milliards de dollars chaque année. Et si on inversait les choses ? Il ne s’agit pas que d’argent, bien sûr. Les missions de trop d’agences se chevauchent. Et trop souvent, celles-ci capitulent devant les forces politiques locales. L’an dernier en Afrique de l’Ouest, l’OMS s’est ralliée à l’avis des politiciens locaux qui ont prétendu qu’il ne fallait pas s’inquiéter d’une petite fièvre venue de la jungle. Six mois plus tard, 10 000 personnes étaient mortes du virus Ebola.

Cela se répercute inévitablement au sommet. Le secrétaire général a toujours été un béni-oui-oui (je dis bien un, parce qu’il s’est toujours agi d’un homme), sélectionné, proposé et approuvé par les cinq membres permanents qui privilégient quelqu’un qui ne s’interposera pas. Ce processus de sélection devra laisser la place à une véritable élection lors de la désignation du successeur de Ban Ki-moon ­l’année prochaine. Et peut-être qu’une femme, comme le suggère Helen Clark, ferait un meilleur travail. Le monde a besoin d’un secrétaire général des Nations unies qui sache tenir tête aux grands pouvoirs au lieu de se contenter d’acquiescer. 

L’ONU ne sera jamais parfaite. Ce n’est après tout qu’un patchwork de 193 nations imparfaites. Mais une chose est sûre. Elle peut s’améliorer.  

Traduit de l’anglais par Anne Akrich

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