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Wendt - Lefaga
Une bande d’ados fait un tabac dans une série néo-zélandaise
Clara Wright
Avachi sur son lit, une guitare électrique violette entre les mains, Jésus braille son désespoir. Une première scène loufoque, typique de la célèbre série télévisée d’animation bro’Town, diffusée en Nouvelle-Zélande entre 2004 et 2009. « Jésus ? On a voulu le représenter comme un enfant unique, pourri gâté », explique la réalisatrice néo-zélandaise Elizabeth Mitchell, amusée. La satire est osée : là-bas, le christianisme est la religion dominante. Mais les téléspectateurs raffolent du feuilleton.
On y découvre le quotidien d’une bande d’adolescents : Vale et Valea, Sione, Jeff da Maori et Mack. La particularité ? Sur les cinq, les trois premiers sont d’origine samoane. « C’est la première série qui décrit le contexte dans lequel j’ai grandi », témoigne Kieran Giles, la vingtaine, fan depuis ses 13 ans. Et pour cause : Auckland est la ville où réside le plus grand nombre de Samoans, Samoa comprise ! Pourtant, jusqu’à la diffusion de bro’Town, pas de trace de ces immigrés à l’écran. Les programmes véhiculaient une réalité lointaine ; le « politiquement correct » voulait aussi que l’on évite de pointer du doigt les nouveaux venus… Avec bro’Town, ces derniers deviennent des héros.
Le tatouage est un rite initiatique
Sébastien Galliot
Mon premier voyage à Samoa remonte à 2001. J’avais 23 ans et je préparais une maîtrise d’ethnologie à l’université de Provence. Je n’avais jusqu’alors que très peu voyagé, sinon à La Réunion mais ce voyage ne fut pour moi pas beaucoup plus dépaysant qu’une escale à La Ciotat ! Mes recherches avaient pour point de départ le tatouage. L’archipel des Samoa est connu comme le seul de Polynésie à pratiquer encore aujourd’hui ce métier traditionnel et rituel. Il n’a pas été abandonné au moment de l’évangélisation, à l’inverse de ce qui s’est passé à Tahiti. J’avais lu des choses sur le sujet, mais rien de très précis et surtout aucune recherche sur la situation contemporaine. Il y avait donc un vide ethnographique. C’est alors que je suis parti pour un premier séjour de deux mois à Samoa.
Je suis arrivé à Apia, la capitale, en pleine nuit : les vols arrivent à trois heures du matin. Tout était nimbé d’une aura de mystère. Dès la descente de l’avion, j’ai été saisi par cet air singulier, humide, très épais et chargé d’une odeur de sous-bois. En traversant la ville, j’ai été accueilli par poules, coqs, et chiens errants. À cette heure tardive, je suis descendu dans le premier hôtel où m’avait déposé le chauffeur de taxi. Présenté sur les brochures comme un établissement luxueux, le lieu était des plus rudimentaires et très onéreux pour l’étudiant que j’étais. Mais je ne comptais pas m’y attarder : le lendemain, je devais rejoindre une famille installée dans le village de Moata’a, non loin d’Apia.
La natte fine
Catherine Clément
Une natte fine de Samoa se présente comme un grand couvre-lit tissé dans une matière qui ressemble au raphia. Mais ce n’est pas un couvre-lit que l’on vend aux touristes ; non, c’est une généalogie. Et la matière n’est pas du raphia, mais du tressage de bandes de pandanus, un tissu obtenu à partir de la sève de l’écorce du mûrier. Découpez sur un tronc de fines lames d’écorce, prélevez la sève, laissez sécher, roulez, trempez, battez sur une enclume pour faire doubler de largeur ladite sève. Ensuite pliez, rebattez, faites sécher en bouchant les trous éventuels avec du manioc bouilli. Votre natte fine est prête.