Comme orateur, Emmanuel Macron n’a pas le talent d’un Mélenchon. Trop appliqué, trop scolaire… On a vu qu’il pouvait se laisser emporter par l’enthousiasme et hurler d’une voix haut perchée, à demi éraillée. Mais ce néophyte apprend vite. Son professeur, le baryton Jean-Philippe Lafont, avec qui il a fait des vocalises, lui trouve « de très belles nasales ».
Emmanuel Macron s’exprime beaucoup mieux que la moyenne de sa génération, sans ponctuer ses phrases de « euh » et de « voilà ». Cet homme de 39 ans ne craint pas les mots désuets : galimatias, sauts de cabri, poudre de perlimpinpin… Dans des interviews, il a même parlé d’« ipséité », au risque de n’être pas tout à fait compris par les ouvriers de Whirpool, les éleveurs laitiers ou les jeunes d’Aulnay-sous-Bois.
Ses tics de langage se distinguent du charabia à la mode. Les « Pardon de vous dire » ne signifient pas qu’il a beaucoup de choses à se faire pardonner. « Je vais être très clair » annonce l’exposé lumineux de deux propositions contraires. « En même temps » illustre son désir de tout concilier. On ne lui reprochera ni de faire les liaisons ni de se souvenir que les femmes représentent la moitié du ciel. Mais rien ne l’oblige à dire systématiquement « celles-zé-ceux », « toutes-zé-tous », pour le plus grand plaisir des imitateurs… Dans la langue de Molière, le genre non marqué (« les Français ») désigne indifféremment les Françaises-zé-les-Français. Ce n’est pas un balancement stylistique qui fera de ce brillant équilibriste un champion de la parité, mais une défense intransigeante de l’égalité des sexes, en commençant par les salaires.