En 2015, 57 % des bébés sont nés hors mariage en France – 65 % des premiers-nés –, quand en 1968, 6 % des enfants étaient dits « illégitimes ». Où trouver une plus grande révolution sur une période aussi courte ? Merci 68 ! Et ce, silencieusement, sans manifestation ni débat enflammé à la Chambre. Le mariage, pierre angulaire de nos sociétés depuis des siècles, nous a quittés. Et… un mariage sur deux célébré à Paris est dénoué avant la cinquième année alors même que l’on vient de voter la loi, heureuse mais si mal nommée, dite du « mariage pour tous ». Le mariage n’est plus un engagement mais une fête, juste « possible » et à la demande. Attention cependant au fait que les pensions de réversion ne sont un droit… que dans le mariage ! État – et partenaires sociaux – conservateur quand tu nous tiens…

Si j’inaugure cette chronique dans le 1 avec ce chiffre, c’est qu’il est pour moi celui qui résume le mieux les bouleversements que nous vivons. Car s’il y a rupture, changement de monde, il n’y a pas effondrement, pas destruction de la famille ou relâchement des mœurs. À l’inverse même. La nouvelle famille, sorte de « tribu quatre générations » excluant parfois l’un ou l’autre, gardant quelques ex ou amis proches, est en pleine forme. Le repas du dimanche y est redevenu un must, 70 % des gens partent en vacances en famille, 20 % des emplois sont trouvés grâce à ce réseau de solidarité puissant quand Pôle emploi plafonne à 9 %. Autrement dit, quand le politique constitué ne s’occupe pas d’un sujet aussi important, les Français en profitent pour agir. Car la naissance d’une société individualisée, nourrie de mobilité et de liberté, est vécue au quotidien bien loin des grandes institutions. Et ce très massivement. Certes, ne faisons pas de ceci une parabole. Ce qui vaut pour le lit ne vaut pas toujours pour la sphère publique et il y faut de la justice. Mais l’énergie est au cœur du peuple : c’est là qu’il faut la saisir. Il y a urgence. 

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