La France déploie beaucoup d’énergie et d’efforts pour vendre de l’armement à l’étranger et rogne sur le budget de ses instituts culturels dans le monde. Tous les gouvernements de ces dernières décennies ont fait la même erreur et le même mauvais calcul. La France ferme les yeux sur les droits de l’homme dans ces pays qui s’arment en permanence, puis elle consent à dépenser quelques miettes pour sa présence culturelle à l’étranger.

Les instituts culturels souffrent d’un manque de moyens pour faire bien leur travail. Quand ils invitent un écrivain ou un artiste, ils raclent les fonds de tiroir ou demandent à des sponsors de les aider à faire connaître ce que la France produit de mieux, en tout cas d’important. 

Au Vietnam, plus personne ne parle le français en dehors de quelques personnes âgées ou des très jeunes qui suivent des cours dans les Alliances françaises. Aux États-Unis, depuis la disparition de Robbe-Grillet, de Michel Foucault et de Jacques Derrida, qui étaient très souvent invités dans les universités américaines, on ne voit la France que comme le pays des 365 fromages et les éditeurs traduisent de moins en moins les écrivains français. 

Miser sur une présence culturelle forte et variée est le meilleur moyen de renforcer l’image de ce pays et de ses choix en politique étrangère. À quoi sert de faire des économies quand on constate le recul et l’affaiblissement de l’influence française dans le monde ?

Autre chose, s’agissant des anciens pays colonisés : l’Afrique et le Maghreb font un triomphe aux langues françaises. Là aussi, les instituts doivent se débrouiller sur place avec des budgets faibles, du moins insuffisants. Je sais, les instituts français au Maroc sont, dit-on, les mieux dotés. Peut-être, mais la demande est importante. Certaines familles font l’impossible pour inscrire leurs enfants dans les écoles de la mission française. Les consuls et ambassadeurs n’en peuvent plus des interventions pour inscrire les enfants de tel ou tel responsable dans ces écoles qui en outre sont payantes. 

La France a besoin de réviser sa politique étrangère. Elle devrait donner la priorité à la diffusion de ses créations culturelles, ce que les Allemands et les Espagnols font de plus en plus. On ne peut pas continuer à jouer sur le tableau de la francophonie politique (l’organisation de sommets des chefs d’État des pays francophones est un gaspillage d’argent scandaleux) et négliger l’expansion et le développement des langues françaises qui sont la source et l’énergie du génie français tel qu’il a été illustré par Hugo ou Voltaire.