Chez Henri Michaux, les mots copulent avec les mots pour former d’autres mots. On songe aux listes d’ancêtres dans toutes les cosmogonies. « Croissez et multipliez, enjoint Dieu à Adam et Ève, dominez sur les poissons de la mer, les oiseaux du ciel et tous les animaux qui rampent sur la terre. » Ce message spéciste est-il encore d’actualité ?
La Population ici, c’est la Marouque
la Bourouque
la Biroubouque
la Gorguena
la Flandoche et la Pouperougue
la Roboueuse
la Clivette à gli gli
la Pastre (glave, glavâtre, biraleuse),
et l’Étarissol
et la Clamidose appelle la Clalicuscusse
Et c’est la Prianthe
la Snique
la Lipatte et l’Avogandron
l’Acrodotte et la Chraponne, surtout la Chraponne
La Limeille tratte à vratte et vrotte à pratte
Et la Cataphanouille
Ici sont mes Ectobars
mes Épotobars de Rronangad
mes Abaratanangars de Rogarrasse
mes Borotonyas Eidéiéssés
mes Baratannyessasa Épitassis
mes Abels
et mes Caïns, dont je ne vois pas la fin
et dont je ne dirai rien
et mes Protocaïns […]
Je vais à une population
que ma population d’à présent cache et dérobe
je vais à une population de derrière ma population
à qui par celle-ci la route alors sera ouverte
À distance (posthume) © Mercure de France, 1997