Favoriser les défavorisés… Donner plus à ceux qui ont moins… C’est pour venir en aide à certains groupes de personnes – notamment les Noirs – victimes de discriminations, que les États-Unis ont mis en place dans les années 1960 l’affirmative action : un système de préférences pour permettre l’égalité des chances. La France s’en est inspirée, à sa manière, afin d’améliorer la situation des femmes ou des handicapés. Doit-on en étendre la formule aux enfants d’immigrés ? Cela supposerait d’établir des statistiques ethniques. Or, la Constitution française proclame le principe de l’égalité devant la loi, « sans distinction d’origine, de race ou de religion ».

Déjà compliquée en soi, la question est obscurcie par le vocabulaire employé. On aimerait bien savoir qui a eu l’idée lumineuse de traduire affirmative action par « discrimination positive ». Et pourquoi tout le monde a adopté une alliance de mots aussi ambiguë. Qu’on le veuille ou pas, « discrimination » est toujours perçue dans un sens négatif.

Faut-il attribuer cette traduction fautive à la passion pour les oxymores, inspirée par les grands auteurs ? On n’en serait peut-être pas là si Corneille n’avait im­mortalisé l’obscure clarté, et Baudelaire l’aimable pestilence. Laissons à la littérature ce qui lui appartient, et évitons d’en nourrir la politique qui a l’art d’embrouiller les choses. Du « changement dans la continuité » à la « croissance négative », tout est bon pour enfumer l’électeur. À quand un débat sur la xénophobie accueillante ou le racisme fraternel ? 

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