On ignore le mot de la fin…
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Les lois de la nature sont universelles, valables de l’infiniment grand à l’infiniment petit. Elles peuvent toutefois produire des manifestations différentes selon l’échelle et ne pas révéler d’emblée à l’observateur leur expression définitive. Par exemple, le comportement d’objets macroscopiques [visibles à l’œil nu] électriquement chargés est différent de celui des électrons autour des noyaux. Les lois que l’on bâtit en scrutant le monde macroscopique se distinguent donc de celles qui résultent de la physique atomique. En réalité les premières sont une approximation des secondes : on dit qu’elles sont classiques, par opposition aux lois microscopiques qui sont les lois quantiques.
Ainsi, la description microscopique du comportement des électrons dans les champs électromagnétiques (rayonnement ou lumière visible) aboutit à la théorie de l’électrodynamique quantique. La lumière y est décrite de manière corpusculaire : elle est constituée de photons qui se substituent aux ondes et rayons classiques. Cette théorie permet d’expliquer remarquablement la cohésion de l’édifice atomique, incompatible avec les lois classiques de l’électromagnétisme qui prévoient l’émission continue d’un rayonnement électromagnétique, jamais observé autour des atomes.
Pour Newton comme pour Einstein les lois de la gravitation sont classiques, façonnées macroscopiquement et validées depuis les échelles cosmologiques jusqu’à la dizaine de microns. Même si cette limite reflète les difficultés techniques de mesurer la (trop faible) force gravitationnelle, une question se pose immanquablement : peut-on étendre la validité des lois classiques de la gravitation au monde atomique ou subatomique ? Sinon, quelle loi observerait-on si l’on avait les moyens de sonder la force gravitationnelle à ces échelles ou en deçà ?
La formulation d’une théorie quantique de la gravitation est une nécessité pressentie par Einstein dès 1916. À l’instar de l’électromagnétisme, les lois de la gravitation doivent être révisées dans l’infiniment petit, sans quoi le mouvement des électrons autour des noyaux déstabiliserait l’atome qui rayonnerait son énergie, à présent sous forme d’ondes gravitationnelles.
À ces considérations de physique atomique se sont greffés au fil du temps d’autres arguments, exotiques et fascinants à la fois, en faveur d’une version quantique de la gravitation. Les propriétés des trous noirs ou encore la théorie du Big Bang révèlent le besoin d’une théorie microscopique, où les gravitons prendraient le pas sur les ondes gravitationnelles, à l’image des photons sur les ondes électromagnétiques.
La quantification de la relativité générale d’Einstein se heurte à des difficultés inhérentes à la description qu’elle fournit du champ de gravitation, identifiées dès les premiers travaux, dans les années 1930. Malgré une activité intense et des acquis importants accumulés au fil du temps, la tâche est ardue et une extension microscopique des lois de la gravitation est pour l’heure inaccessible. Soit parce qu’elle est incomplète ou insatisfaisante, dans les théories canoniques de gravitation quantique dont une émanation contemporaine est la gravité quantique à boucles. Soit parce qu’elle appelle à une modification radicale des lois fondamentales de toutes les interactions, dans les théories de supergravité ou de supercordes. Ces théories, où toutes les forces paraissent unifiées, défient à ce point l’intuition, que la dimension même de l’espace y est supérieure à trois.
On ignore donc le mot de la fin, mais tout suggère qu’une théorie quantique de la gravitation apportera une profonde révision de l’espace, du temps et de la géométrie aux échelles microscopiques.
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