Écrire Djibouti, son histoire et sa géographie, ses rêves et ses ratés, telle fut la mission que je m’étais donnée il y a plus de vingt ans. La minuscule république est présente dans la plupart de mes livres. Et plus d’une fois, mon imagination a été largement battue par celle des politiciens locaux. Les autorités, connues pour leur inanité, leur addiction au khat et à l’aide étrangère, ont pris l’habitude de lancer des projets somptueux qui ne voient jamais le jour. Poses de pierres, éléphants blancs, plans sur la comète, tout est bon pour nourrir le moulin à paroles de la présidence. 

Au mitan des années 2000, on a parlé un temps de la construction du pont le plus long du monde (28,5 km) reliant l’Afrique à la péninsule arabique à travers la mer Rouge. Le romancier ne pouvait pas imaginer projet plus alléchant : on nous annonce qu’il sera l’œuvre de la fameuse Middle East Development Corporation (MEDCO), l’entreprise de BTP du Saoudien Tarek Mohamed Ben Laden. Sa conception technique aurait déjà été confiée à la Noor City Development Corporation (NCDC), un bureau d’architectes installé en Californie, dans la Silicon Valley. Une ville nouvelle, baptisée Madinat Al-Noor (« ville lumière »), surgira de la brousse. Davantage que le nez de Cléopâtre, ce pont devrait changer la face de cette région du monde. 

Bien sûr, ni le pont ni la ville de rêve ne verront jamais le jour. Aujourd’hui, on parle de la construction de deux nouveaux aéroports dans notre minuscule république alors que le seul aéroport, legs de la France, est très mal utilisé. Pour faire quoi ? 

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