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Repères : la précarité depuis 1973
« Nous devons réfléchir à un système plus redistributif »
Pierre Cahuc
Les CDI règnent très largement sur le marché du travail et pourtant les CDD semblent former un univers en expansion permanente. Pouvez-vous confirmer cette photographie et expliquer ce paradoxe ?
La situation française est bien celle-là : d’un côté, les CDI, qui représentent 85 % du salariat et dont le volume est stable ; de l’autre, une explosion des contrats courts. Le phénomène date du début des années 2000. Les CDD très courts occupent une part de plus en plus importante dans certains secteurs d’activité comme la restauration, le tourisme, l’enseignement, l’audiovisuel, le déménagement, etc. L’opinion ignore souvent que les CDD peuvent y être légalement renouvelés sans contrainte et qu’un nombre important de salariés signent des contrats de moins d’un mois et souvent de moins d’une semaine. Ils ne cessent de travailler, de s’interrompre et de reprendre leur activité, la plupart du temps au sein de la même entreprise. Il s’agit d’une caractéristique très française, quasi institutionnelle, qui est en grande partie liée au système d’assurance chômage.
Environ 800 000 personnes vivent sous le régime dit de l’activité réduite sans limite : elles perçoivent une indemnité chômage à condition de travailler moins de 110 heures par mois. Dans ce cas, elles gardent 30 % de leurs gains salariaux en plus de leur indemnité et prolongent leurs droits à l’assurance chômage. Voilà la raison principale de cette singularité française du CDD.
Lexique
Robert Solé
Angoisse : Sentiment éprouvé par les CDD, et que seul peut comprendre un élu, lui-même affligé d’un mandat à durée déterminée (MDD). Il a parcouru des kilomètres, hanté les préaux d’école, serré d’innombrables mains, multiplié les promesses, trahi des amis, fait alliance avec Dieu sait qui… et voilà qu’à peine vainqueur, il doit mobiliser toute son énergie pour se faire réélire au tour suivant.