Chaque jour ouvrable, 10 000 salariés quittent leur emploi et, les bons jours, 10 000 sont embauchés. Nous sommes donc face à un « flux » en renouvellement constant avec un stock, un « reliquat » accumulé au fil du temps : c’est ce chiffre-là que donne chaque mois Pôle emploi. Calculer le coût du chômage est complexe car, comme sur tout marché, il y aura toujours un stock nécessaire à la rotation des places. Chacun comprend par exemple que si 10 % des Français déménagent chaque année, il y a en permanence des logements en réfection ou en attente de relocation. Estimons que la moitié des chômeurs sont entre deux emplois. Il faut donc évaluer deux coûts, celui du marché du travail « normal », et celui du surcoût lié à une gestion de la société par un chômage de masse.
D’un point de vue financier, avec le coût des indemnités de Pôle emploi, des non-cotisations à la Sécurité sociale, de la non-contribution fiscale… on peut estimer le coût du chômage autour de 76 milliards par an, dont la moitié en indemnisations. C’est sans doute une estimation basse. Mais cela permet de dire que le coût de fonctionnement du marché du travail est un peu supérieur à 38 milliards, et que celui du « surstock de chômeurs » est un peu inférieur car nombre de chômeurs de longue durée ne sont plus indemnisés ; leurs souffrances entraînent alors d’autres coûts, de santé ou de perte de capacité à travailler. Et comment évaluer les difficultés dans les couples ou celles des enfants ?
Il y a peu de travaux d’analyse économique consacrés à ce sujet, comme si on s’était habitué au chômage de masse. Le FN, lui, « sait très bien » que le chômage coûte plus de 100 milliards par an, mais comment le sait-il ? On l’ignore… N’oublions pas par ailleurs que de nombreux chômeurs ont des activités parallèles – garde de leurs enfants ou petits-enfants, formation, bénévolat… sans parler du travail au noir qui crée de la richesse, à défaut de produire de la taxe.
La société a « mal au chômage », qui est devenu sa grande angoisse. Et en France, toucher à ce mal est difficile, tant notre culture nous a préparés à être agriculteur ou fonctionnaire, deux métiers éloignés du « marché » du travail. Peut-être faudrait-il donner le droit aux paysans de s’inscrire à Pôle emploi et faire entrer « le marché du travail » dans la fonction publique pour faire avancer le débat ?