C’est une saga qui interroge notre modèle agricole, les mille inconnues de la santé environnementale mais aussi le fonctionnement de nos institutions. Commencée les pieds dans les blés, elle file vers les ministères parisiens et nous entraîne jusqu’aux coulisses de l’Union européenne.

« Quand l’hôpital vous appelle et vous demande d’arrêter ce que vous êtes en train de faire, c’est mauvais signe. » Éric Dolffus habite la plaine d’Aunis, en Charente-Maritime. Il y a deux ans, il a déposé son fils de 10 ans et sa femme aux urgences de La Rochelle. Cela faisait quelque temps que le garçon était blanc comme un linge et très fatigué. Avant de raconter la suite, le père de famille dissimule son émotion derrière ses lunettes de soleil. « Les médecins m’ont annoncé qu’Aurèle avait une leucémie aiguë », articule-t-il, la voix brisée.

Son récit déroule une succession d’épreuves : deux mois en chambre stérile et 35 ponctions lombaires pour Aurèle, la peur atroce de perdre un enfant pour les parents, une fratrie qui tangue… Puis le soulagement que le protocole médical fasse effet et, jusqu’à aujourd’hui, un « cachet de chimio tous les soirs » pour le garçon.

La famille Dolffus n’est pas la seule de la plaine d’Aunis à avoir basculé dans l’enfer des cancers pédiatriques. Sur les seules communes de Périgny et de Saint-Rogatien – 10 000 habitants au total –, huit enfants ont contracté un cancer entre 2008 et 2018. Une étude de l’Inserm y identifie « un excès de risque » pour les moins de 25 ans, tout en soulignant la faiblesse de l’échantillon. Mais les villages alentour aussi sont touchés : il y a Aurèle, donc, qui habite Esnandes. Et aussi Eliott, diagnostiqué d’un cancer osseux à 2 ans. Et d’autres encore. « Quand j’ai amené mon fils au CHU de Poitiers, se souvient Éric Dolffus, les infirmières ont eu une phrase étonnante : « Tiens, encore un enfant de La Rochelle ! »

 

Une impasse technique

Qu’a-t-elle de particulier, cette plaine d’Aunis, pour que les enfants y tombent si gravement malades ? Le décor est pourtant riant : des lotissements en bord de champs, des roses trémières à l’assaut des façades, et des drapeaux jaune et noir du Stade rochelais, héros du ballon ovale.

La santé environnementale est une équation à multiples inconnues. Le mal viendrait-il de produits chimiques utilisés dans toutes ces maisons ? Ou bien de l’usine d’enrobés et de bitumes de Périgny, ce cube de tôle massif où l’on travaille avec des graviers et des hydrocarbures ? « Le comité de pilotage nous a montré que les rejets dans l’air étaient minimes », assure Franck Rinchet-Girollet. Père du petit Eliott, il est devenu « militant sur le tas » au sein de l’association d’habitants Avenir Santé Environnement.

Autre piste d’explication : l’exposition aux pesticides agricoles. Car la plaine d’Aunis est intensément cultivée : tournesol, pois, colza, mais surtout orge et blé. À la moisson, une bonne partie des grains partira directement vers le port tout proche de La Pallice avant d’être exportée vers l’Afrique subsaharienne et le pourtour méditerranéen.

« Quand les plantations sont trop souvent les mêmes, quand il n’y a plus de haies ni de biodiversité, les équilibres se rompent »

Revenons à nos champs. À bien y regarder, des graminées surplombent les tapis de céréales. Il s’agit de ray-grass, ou ivraie vivace, cette herbe qui fait le bonheur des sportifs sur les terrains de foot ou de tennis. Mais dans les champs, où elle pousse de façon spontanée, elle concurrence les cultures et nuit aux rendements. À 200 euros la tonne de blé, l’enjeu est de taille. C’est pour contrer cette indésirable, entre autres, que les cultivateurs sortent le pulvérisateur, épandant des herbicides nommés prosulfocarbe ou chlortoluron.

« Avec l’agrandissement des exploitations, les agriculteurs ne s’embêtent plus à faire de l’élevage ni des rotations de culture, déplore une personne de la chambre régionale d’agriculture, sous couvert d’anonymat. Quand les plantations sont trop souvent les mêmes, quand il n’y a plus de haies ni de biodiversité, les équilibres se rompent. L’utilisation intensive de ces produits révèle l’impasse technique de ces systèmes agricoles. »

Le problème, c’est que les pesticides ne restent pas sagement sur les champs où on les épand. Dans la plaine d’Aunis, sous la pression des habitants, une étude sur la qualité de l’air a été lancée. Planté dans un parterre de roses, le capteur en forme de petite cheminée fait face à une école maternelle. Verdict pour 2019 : 33 pesticides présents dans l’air. Deux ans plus tard, record battu : 41 pesticides sont détectés, dont des taux jamais vus de prosulfocarbe. D’après le président de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), interrogé en 2018, cet herbicide est « beaucoup plus préoccupant » que le glyphosate. « Les premiers rapports n’ont pas permis de conclure à un lien avec les cancers pédiatriques, nuance Benoît Elleboode, directeur général de l’agence régionale de santé. Ça n’exclut pas une causalité mais, statistiquement, rien n’a pu être établi. »

D’autres produits se diffusent non pas dans les airs mais dans les eaux. Fin 2021, toujours dans la plaine d’Aunis, un point de captage d’eau potable a été contaminé au chlortoluron, un herbicide classé cancérigène. Il a alimenté les robinets plusieurs jours, avant d’être fermé.

Des produits de traitement dans la cour de récré

La situation de la plaine d’Aunis est-elle exceptionnelle ? Pas tant que ça, si l’on en croit Générations futures. L’association a rassemblé sur une carte de France les témoignages de personnes s’estimant « victimes des pesticides ». Il y en a des centaines. Asthme, maux de tête, vertiges chez les enfants après des épandages… Ici, un cycliste qui sillonne régulièrement le Vexin : dans les périodes de traitements, il dit subir de violents maux de tête. Ailleurs, un trentenaire, naguère tout content de son pavillon dans la Beauce, y a développé en deux ans une polyneuropathie : le voilà en fauteuil roulant.

Près de Lille, Edmond Leduc, un médecin à la retraite, vit en bordure de champs de maïs et de pommes de terre depuis quarante ans. En 2018, on lui diagnostique un lymphome non hodgkinien. « Les spécialistes m’ont dit que ce n’était pas étonnant, vu où se situe ma maison », relate le retraité. De sa voix tranquille, il liste les administrations qu’il a alertées et qui n’ont pas bougé : mairie, agence régionale de santé, FNSEA, hôpitaux… « C’est excessivement difficile de se battre, dit-il. Toute la profession soutient les agriculteurs, à commencer par les coopératives, car elles leur vendent les produits. » D’abord mobilisés avec lui, les voisins d’Edmond Leduc finissent par abandonner. « Ils craignaient de subir des pressions, dit-il, et de voir leur maison perdre de la valeur. »

Sur ce sujet, « la démocratie sanitaire ne fonctionne pas »

La proximité entre les champs et les habitations est au cœur du sujet, a fortiori lorsque des lotissements colonisent les zones agricoles, ou lorsque les écoles sont collées aux vignes. À Viré, en Saône-et-Loire, une habitante s’est révoltée lorsque ses enfants ont reçu des pesticides sur la peau, dans la cour de récréation. « On confie nos enfants à une institution, et ils subissent une atteinte très grave à leur santé ! » enrage Marine Pasquier. Depuis elle anime un collectif pour sensibiliser sur les traitements : « On explique comment se protéger un minimum : rentrer les enfants et les animaux, fermer les fenêtres, couvrir le potager si possible… »

À force de négociations, la plupart des vignes autour de l’école ont été arrachées. Mais la militante poursuit le combat, et se heurte à l’omerta tous les jours : « Le lobby viticole est hyper puissant. Certains riverains adhèrent à notre association, mais en secret. Ils se mettent à chuchoter lorsqu’on aborde le sujet ! »

Un « camouflage des preuves » organisé

L’omerta vaut-elle aux plus hauts niveaux de l’État ? « J’ai assisté aux débats autour de la dernière proposition de loi sur l’agriculture, expose Mickaël Vallet, sénateur de Charente-Maritime. L’industrie des pesticides serait paranoïaque si elle pensait avoir de féroces ennemis au ministère. »

L’élu s’inquiète par exemple qu’une étude complémentaire de l’Anses sur le prosulfocarbe se fasse attendre depuis septembre. L’agence plaide qu’une telle étude « pluridisciplinaire, mobilisant de nombreuses connaissances et des experts » peut prendre du temps.

« On ne fait rien de mal : les produits qu’on utilise sont autorisés »

Laurence Huc, toxicologue à l’Inrae, se dit choquée de l’« inaction » des agences sanitaires dans le cas de la plaine d’Aunis : « J’y vois une carence de l’État, dit-elle. Quand ce sont les associations qui doivent contacter les chercheurs et financer des études, ça signifie que la démocratie sanitaire ne fonctionne pas. »

Le flou prévaut également du côté des statistiques qui permettraient d’explorer les liens entre santé et pratiques agricoles. Un registre national des cancers, par exemple, serait bien utile. Mais sur 101 départements, seuls 26 ont pris l’initiative de créer le leur. Il serait précieux aussi de savoir, chaque année, quels pesticides sont employés sur chaque parcelle. « La Direction générale de la santé nous a confirmé que ces données d’épandage existent, assure le Limougeaud Pierre-Michel Périnaud, président de l’association Alerte des médecins contre les pesticides et membre de la coalition Secrets toxiques. Mais cela fait trente ans que le ministère ne laisse rien sortir. L’État organise soigneusement le camouflage des preuves. »

Nous avions beaucoup de questions pour le ministère de l’Agriculture. Pourquoi faire de la rétention d’information sur les données d’épandage ? Pourquoi défendre la réautorisation du S-métolachlore, un puissant herbicide dont on retrouve des métabolites dans la moitié des eaux testées ? Pourquoi le plan Écophyto, censé diminuer le recours aux pesticides agricoles depuis 2012, a-t-il abouti à une augmentation de 25 % des doses utilisées ? Mais ces questions aussi resteront sans réponse. Le ministère n’a pas donné suite à notre demande d’interview.

« Les gens nous traitent d’empoisonneurs »

Dans la plaine d’Aunis, le flou attise les tensions. Des militants écologistes et des élus ont écopé de menaces et d’insultes, certains ont même été visés par des dégradations. À l’inverse, les cultivateurs se plaignent d’une ambiance oppressante.

Fanny Gaudin, la trentaine énergique, est fière de son élevage caprin et de la boutique attenante, qui fleure bon le fromage de chèvre. Régulièrement, après s’être occupée des bêtes, elle prépare le pulvérisateur pour son frère, qui cultive les champs alentour avec leur père. « On fait de notre mieux : utiliser les satellites pour adapter les quantités de traitement, désherber mécaniquement autant que possible, traiter la nuit, car la fraîcheur évite l’évaporation du produit… Et malgré ça, les gens nous traitent d’empoisonneurs, nous font des gestes obscènes et caillassent les tracteurs, déplore cette membre du syndicat Jeunes agriculteurs. On finit par se demander ce qu’on fait de mal : les produits qu’on utilise sont autorisés ! »

« Fuir les pesticides est très compliqué : l’air bio, ça n’existe pas »

Franck Rinchet-Girollet, de l’association de riverains, la rejoint : « On n’en veut pas aux agriculteurs, mais à ceux qui mettent ces produits sur le marché. » Approbation également de François Veillerette, directeur de Générations futures : « Pour ne pas s’exposer à certains produits chimiques, on peut décider de ne pas en utiliser chez soi, éviter les peintures artificielles ou les matériaux toxiques… Mais fuir les pesticides c’est très compliqué : l’air bio, ça n’existe pas ! Si on veut en sortir, il faut agir sur la réglementation. »

 

Quand la mort fait partie du calcul

Nous voilà au cœur de la question : comment les pesticides sont-ils autorisés à la vente ? Première surprise, quand on creuse le sujet : ce sont Bayer, BASF, Monsanto et les autres fabricants qui testent leurs propres produits. Ils soumettent ensuite leurs résultats à l’Efsa, l’agence sanitaire européenne, puis à l’Anses, l’agence française. « Nous ne reproduisons pas les tests des fabricants, mais ils sont censés respecter des bonnes pratiques de laboratoire », indique l’agence.

Deuxième découverte : les tests de toxicité comportent des angles morts. Ceux soumis à l’Efsa ne portent par exemple que sur la substance active du pesticide, pas sur ses autres ingrédients. L’Anses, elle, regarde l’ensemble des composants. Il lui arrive d’édicter des « recommandations d’usage ». Pour les produits à base de prosulfocarbe, l’herbicide relevé dans l’air de la plaine d’Aunis, les agriculteurs doivent désormais prendre des mesures pour épargner les « cultures non-cibles ».

Dans les années 2000, des géants des pesticides ont caché aux autorités européennes des tests concernant l’impact de leurs produits sur le développement du cerveau

Troisième source d’étonnement : le non-encadrement des pesticides ayant un effet de perturbateurs endocriniens (PE). Ces substances savent se substituer à nos hormones, et donc pirater le fonctionnement de l’organisme. Elles sont associées à des pathologies comme l’obésité ou la puberté précoce. Et avec les PE, ce n’est pas la dose qui fait le poison. « Les hormones se fixent sur un récepteur, à la façon d’une clé dans une serrure. Il suffit d’une seule clé pour ouvrir la serrure », expose Laurence Huc. Selon les textes européens, ces produits PE devraient être interdits. Problème : l’Union européenne n’a quasiment pas répertorié les perturbateurs endocriniens. « En attendant, dans le doute, on autorise ces produits », déplore la scientifique.

Dernière révélation en date : dans les années 2000, des géants des pesticides ont caché aux autorités européennes des tests concernant l’impact de leurs produits sur le développement du cerveau. En jeu, des liens avec l’autisme ou l’hyperactivité. « Malgré cela, ces pesticides ont obtenu une autorisation de mise sur le marché ! La science est truandée à de nombreux niveaux. Et après on fait croire à la population, et aux agriculteurs, qu’il n’y a pas de problèmes », s’insurge Laurence Huc.

Les fabricants sont parfaitement conscients des risques que comportent leurs produits. En témoigne ce dossier réglementaire de 1988, déposé par Monsanto auprès du ministère de l’Agriculture pour faire autoriser l’alachlore. Selon le document, appliquer cet herbicide une fois par an multiplie par cent le risque de cancer pour les agriculteurs. Un peu plus loin, page 35, on apprend que les enfants de 1 à 6 ans qui consomment des aliments traités à l’alachlore ont un risque sur 100 000 de développer un cancer.

« Les probabilités sont calculées : on tient compte du fait que les personnes les plus sensibles vont tomber malades et mourir », souligne Laurence Huc. Scandalisée, elle répète cette phrase entendue en comité de déontologie de l’Anses : « Les limites maximales de résidus autorisées, c’est le bas bruit des morts. »

Franck Rinchet-Girollet, père du petit Eliott, a cru devenir fou lorsqu’il a accompagné son fils en traitement. « Sur les poches de chimio, il y avait la marque Bayer ! souffle-t-il. La boucle est bouclée : l’industrie chimico-pharmaceutique vend des produits pour traiter les champs, dégrade la santé et la biodiversité, et, derrière, vend plus de médicaments. »

 

Manger bio diminue l’exposition aux pesticides

À ce stade de notre enquête, le tableau est bien noir. Il faut filer à Toulouse pour trouver une source d’espoir. La chercheuse Laurence Payrastre est spécialisée en toxicologie alimentaire à l’Inrae, dans l’unité Toxalim. Elle a fouillé les études nutritionnelles. « Grâce à la cohorte NutriNet Santé, nous savons que, chez les personnes qui mangent bio, la présence de pesticides dans les urines est presque diminuée de moitié », relate-t-elle. Toutes choses égales par ailleurs, les études montrent aussi que « plus la consommation d’aliments bio est fréquente, plus le risque de cancer, de surpoids, d’obésité et de diabète est diminué ». Le Programme national nutrition santé (PNNS) recommande d’ailleurs d’« aller vers » des aliments bio.

« Donne-moi de la luzerne, je passe en bio »

Faut-il donc conseiller à tous les paysans de France de passer au bio ? Ce mode d’agriculture autorise quelques pesticides, comme le cuivre ou le soufre, mais pas de produits de synthèse. Dans l’arrière-pays rochelais, certains ont sauté le pas. Noël Michot, par exemple. Il a repris la ferme familiale après la mort de son père, décédé d’un cancer des poumons. « J’ai diminué les doses petit à petit, raconte-t-il dans sa ferme, à quelques encablures de l’océan. Et un jour, alors que j’allais verser le colza dans le semoir, j’ai changé d’avis. Je suis retourné là où j’achète mes semences et j’ai dit : “Donne-moi de la luzerne, je passe en bio.” »

Une décision sur un coup de tête, qui lui vaut encore quelques migraines. À la fois maraîcher et cultivateur, il se paie péniblement « mille euros de temps en temps ». Mais il ne reviendrait en arrière pour rien au monde, satisfait d’avoir « la conscience tranquille » et de voir hirondelles et coccinelles faire leur retour sur ses parcelles.

 

Une agriculture sans pesticides de synthèse ?

« Dans l’histoire de l’agriculture, les produits ont été une libération, rappelle notre source à la chambre l’agriculture. Mais les professionnels ne sont pas coupés du monde, ils voient que la société évolue. Quand on organise des formations sur le désherbage mécanique, ils sont preneurs. »

Des instituts comme l’Inrae ou l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri) ont sorti les calculettes et conclu qu’une agriculture européenne sans pesticides de synthèse était possible à l’horizon 2050. Mais les agriculteurs ne pourront pas changer à eux seuls un modèle vieux de soixante-dix ans. L’Inrae précise les conditions pour relever le défi : partager le risque, harmoniser les politiques publiques et mobiliser tous les acteurs. Cela implique sans doute d’exporter moins de céréales via le port de La Pallice. De veiller à ce que des poisons comme le datura ou des maladies comme l’ergot du blé ne refassent pas leur apparition. De cultiver des surfaces plus petites, avec plus de main-d’œuvre. Et, pour les consommateurs, de payer un peu plus cher pour se nourrir, ou du moins d’exiger que l’argent public subventionne cette alimentation, comme il soutient aujourd’hui l’agriculture conventionnelle ou la dépollution des eaux.

Benoît Biteau est à la fois agronome, paysan bio et député européen. Il jure que l’agroécologie fonctionne – sa ferme en polyculture et polyélevage, autonome pour les semences comme pour les engrais, le prouve. Bacchantes et cheveux longs, cet écologiste peste contre le « système tentaculaire » de la FNSEA, le syndicat agricole majoritaire. « Ils verrouillent tous les espaces de décision et empêchent de s’affranchir des pesticides, tonne-t-il. Mais la démocratie sert justement à décloisonner, à décider que l’agriculture est un sujet de société, pas seulement d’agriculteurs. Parce que la santé publique est concernée, parce qu’on parle de climat et de biodiversité. »

« Imaginons une agriculture moins délétère pour les riverains, les agriculteurs et les générations futures ! »

Déjà, certaines collectivités s’y mettent. L’agglomération de Strasbourg offre des paniers bio aux femmes enceintes. L’agence de l’eau de Paris accompagne les agriculteurs vers moins de traitements dans les zones de captage de l’eau. « Il faut aussi instaurer des zones sans pesticides de plusieurs centaines de mètres autour des écoles, préconise Pierre-Michel Périnaud, le médecin de Limoges. Aucune mesure n’est suffisante, mais il faut tout faire. Et pour ça, il faut être nombreux. »

Franck Rinchet-Girollet sera de la partie, c’est certain. « On ne demande pas que les agriculteurs soient ruinés, mais qu’il y ait un investissement massif pour engager la transition. Imaginons une agriculture moins délétère pour les riverains, les agriculteurs et les générations futures ! » plaide-t-il. Son fils, Eliott, a maintenant 6 ans. Il se remet bien de son cancer. Mais va très rarement se promener dans les champs. 

 

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