Pour Tarass Chevtchenko, fils de serf, la chaumière natale est un paradis et un enfer. Ses premiers poèmes disent la beauté des steppes et l’espoir des moujiks en une existence meilleure. Il écrit Testament en 1845, avant d’être déporté par le tsar pour ses opinions révolutionnaires. C’est un patriote : le poète national de l’Ukraine. 

Quand je serai mort, mettez-moi
Dans le tertre qui sert de tombe
Au milieu de la plaine immense,
Dans mon Ukraine bien-aimée.
Pour que je voie les champs sans fin,
Le Dniepr et ses rives abruptes,
Et que je l’entende mugir.
Lorsque le Dniepr emportera
Vers la mer bleue, loin de l’Ukraine,
Le sang de l’ennemi, alors
J’abandonnerai les champs,
Jusqu’au ciel je m’envolerai
Pour prier Dieu, mais si longtemps
Que cela n’aura pas eu lieu.
Je ne veux pas connaître Dieu.
Vous, enterrez-moi, levez-vous,
Brisez enfin, brisez vos chaînes,
La liberté, arrosez-la 
Avec le sang de l’ennemi.
Plus tard dans la grande famille,
La famille libre et nouvelle,
N’oubliez pas de m’évoquer
Avec des mots doux et paisibles.

Traduit par Guillevic dans Tarass Chevtchenko, Seghers, « Poètes d’aujourd’hui », no 110, 1964 © Éditions Seghers

 

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