Le conflit entre l’État hébreu et ses voisins paraît insoluble. Il a pourtant donné lieu à deux prix Nobel de la paix : le premier a été attribué conjointement à Anouar al-Sadate et Menahem Begin en 1978, avant même la conclusion du traité égypto-israélien ; le second est revenu à Yasser Arafat, Shimon Peres et Yitzhak Rabin en 1994, après les accords d’Oslo.

On ne peut pas dire que ces récompenses aient fait l’unanimité. Refusant d’être placé à égalité avec Begin, Sadate ne s’est pas rendu personnellement à la remise du prix. Seize ans plus tard, l’un des cinq membres du jury, le Norvégien Kaare Kristiansen, a donné sa démission pour ne pas avoir à honorer un Yasser Arafat « au passé teinté de terrorisme ». Et, par la suite, quand les accords d’Oslo ont capoté et que des combats meurtriers ont fait de nombreuses victimes à Gaza, des voix se sont élevées pour qu’on enlève le titre à Shimon Peres, devenu entretemps président d’Israël.

Mais un Nobel est attribué à vie : « aucun recours ne peut être formé » contre la décision du jury, affirme l’article 10 du règlement. Le récipiendaire est libre de se reposer – ou même de s’endormir – sur ses lauriers. On n’a dénobélisé ni l’ancien secrétaire d’État américain Henry Kissinger ni la dirigeante birmane Aung San Suu Kyi, malgré les vives critiques suscitées par leurs comportements ultérieurs.

Tous les ans, les candidatures de plus d’une centaine de personnalités ou institutions sont soumises au comité norvégien. En septembre 2020, après la conclusion des accords d’Abraham entre Israël et deux pays du Golfe, un député italien avait proposé le nom de Benjamin Netanyahou. Imaginons que « Bibi » ait décroché le prix Nobel de la paix l’année suivante, en dépit de toutes les casseroles qu’il traînait déjà. Fort de cette auréole, ou sanctifié par elle, aurait-il réagi différemment à l’affront meurtrier du Hamas ? 

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