Comment expliquer la puissance du couple Sartre-Beauvoir sur la scène française ? 

Par la façon dont Sartre et Beauvoir défient leur époque en France. C’est un événement révolutionnaire, je pense à la manière dont ils se rencontrent et dont ils se traitent l’un l’autre. Ils sont jeunes, ils se rencontrent à l’École normale supérieure. D’un côté, Simone de Beauvoir, issue d’une famille noble, catholique à une époque où le catholicisme était loin d’être en ruine – c’est ce qu’elle raconte dans Mémoires d’une jeune fille rangée. De l’autre, Sartre, né trublion, insoumis si vous voulez, avec des capacités intellectuelles très supérieures à la plupart de ses condisciples. Il est protestant, elle est catholique. Cela change tout. Il est très important et intéressant dans la société française d’étudier les origines sociales et religieuses des familles. 

S’agit-il seulement d’un couple intellectuel ?

Écoutez comment Beauvoir appelle Sartre dans leur correspondance : « Tout cher petit », « petit bien-aimé », « petit pur », « cher petit vous autre », « petit absolu ». Et voici ce qu’elle lui écrit : « Vous seriez donc un bien grand philosophe, petit homme, petite bonne tête » ; et encore : « Je suis tout effondrée de tendresse pour vous. » C’est de l’amour ou alors je ne m’y connais pas, une relation très intense qui va durer toute la vie, sans pour autant impliquer une fusion sexuelle constante. Simone de Beauvoir s’en est très bien expliquée, à savoir que Sartre n’était pas de ce point de vue un virtuose. Et c’est avec sa liberté propre, lorsqu’elle rencontrera l’écrivain américain Nelson Algren qui lui apporte un supplément physique qu’elle assume pleinement – à l’époque, elle a quarante ans –, qu’elle va être conduite à écrire Le Deuxième Sexe. J’ai la plus grande admiration pour cette possibilité de régler sa vie. Elle ne v

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