Le 2 décembre 1887 démissionne le président Jules Grévy, éclaboussé par le « scandale des décorations » : des Légions d’honneur étaient vendues dans des maisons closes. Dans la presse, Raoul Ponchon s’amuse à versifier un ironique bla-bla ministériel… De son compagnon de beuverie, Verlaine disait qu’il était un « poète tout sympathie ». 

Messieurs les Sénateurs, Messieurs les Députés,
Merveilleux orateurs justement réputés,
L’humble cabinet qui devant vous se présente
N’a d’autre ambition à l’époque présente
Que de continuer avec conviction
Cette œuvre d’entente et conciliation
Républicaines commencée en la journée
Du trois décembre où la crise fut ajournée.

Notre pays voit – est-ce une aberration ? –
Dans cette beautiful manifestation
De l’Assemblée, hier pleine encor de tangage,
De paix intérieure un très précieux gage ;
Lui donner cette paix est pour nous un devoir.
Le pays tout entier se berce de l’espoir
Qu’aux agitations politiques civiles
Qui font s’entre-tuer les habitants des villes
Va succéder – au moins jusques à cet été –
Une ère de repos et de tranquillité
Si nécessaire à la reprise des affaires
Depuis longtemps languissantes et poitrinaires.

Pour répondre à ce que la France attend de nous,
N’en doutez pas, Messieurs, avec un soin jaloux
Pendant ni plus ni moins qu’une semaine entière
Nous potasserons la question financière,
La sociale et puis l’économique aussi,
Itou la militaire : elle s’impose si
Impérieusement à la sollicitude
Du Parlement que j’en ferai ma propre étude.

Dans l’ordre financier nous continuerons à
Travailler sans cesse à rééquilibrer la
Balance budgétaire un tantinet bancale
À la suite de la crise commerciale (…)
 
            On nous verra suer à notre tâche, 
Qui est de conserver ta dignité 
France républicaine et ta prospérité !

La Muse gaillarde, Éditions Rieder, 1939

 

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