On croit parfois, paresse d’esprit, que la francophonie est un vieux machin hanté par deux ou trois académiciens échappés des pages du dictionnaire. Rien n’est plus inexact. À l’échelle de l’histoire, la francophonie est non seulement une notion contemporaine mais aussi une idée neuve. 

On croit souvent, par arrogance, qu’il s’agit d’une invention française parce que le Français Onésime Reclus, géographe de son état, a le premier recouru à ce mot en 1886. Mais c’est d’Afrique que vint le projet, notamment porté par le président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor, véritable père de la francophonie. 

On croit enfin et surtout que le général de Gaulle récupéra habilement l’ambition. Rien n’est moins vrai. Aux demandes du Sénégal, du Niger, de la Tunisie ou du Cambodge, il opposa au début des années 1960 une sèche fin de non-recevoir, comme s’il craignait une atteinte à la grandeur solitaire de la France. Il faut voir les images de sa conférence de presse, en 1966, lorsqu’un journaliste africain ose lui demander, après la visite des présidents du Sénégal et du Niger venus l’entretenir du sujet, quelle est sa position sur la francophonie. De Gaulle écoute, maussade, et lâche d’une moue dégoûtée : « Ouais ! » Il n’en dira pas plus…

Comment mieux dire que la francophonie n’est pas précisément une histoire française et qu’elle n’a rien à voir avec le drapeau français. Elle est beaucoup plus. C’est la patrie de la langue française, un espace sans frontières. 

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