Notre société est entraînée par une révolution numérique, collaborative et culturelle qui concentre l’innovation, la mobilité, la liberté individuelle et la richesse dans une classe créative au cœur des très grandes métropoles. Là est produit 61 % du PIB français. On y est Vélib’ et high-tech, low cost, usage plus que propriété, université, start-up, communication, colocation, finance, COP21… On y est nomade et mondialisé. 

L’ancienne classe ouvrière, elle, est partie vers les campagnes rejoindre dans un vaste périurbain la précédente classe majoritaire, la paysanne. Le pavillon a remplacé la maison du peuple. L’idée de compenser par une mission historique la difficulté du quotidien a disparu. On est face à son destin et on le vit sans perspective. Dans ces territoires, 74 % des salariés partent travailler en voiture, plutôt diesel, sans alternative possible.

Alors « la foule y écrase le peuple » comme disait Victor Hugo. Car le peuple avait une mémoire et un récit, des luttes partagées, des foucades et des haines. Mais il formait groupe. La foule se réfugie dans la sédentarité et cherche une identité dans le territoire, les frontières, les appartenances d’hier – sociales ou religieuses. Contre « les autres » aussi. Mouvement qui touche bien sûr aussi les groupes, les pays et les cultures déjà dominés qui se replient alors un peu plus sur eux-mêmes.

D’un côté, donc, une classe innovante et dominante – mais sans conscience de classe car individualisée, accélérée, diverse – ; de l’autre, une foule qui se répand de plus en plus loin des villes et des nœuds de circulation avec, entre les deux, d’anciens quartiers ouvriers où se rassemblent les anciens « nouveaux » arrivants. Les quartiers, donc. Chaque région, chaque territoire offre ensuite un terreau différent à ces bouleversements. Mais le mouvement de fond est là. Il doit être le cœur de la pensée d’une politique refondée. La question n’est plus d’aller du bas vers le haut mais de la périphérie vers le centre. Il faut inventer « l’ascenseur social horizontal ». Un métro social ? 

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