Les États arabes ont souvent brillé par leur désunion. Les peuples arabes ont toujours déploré ce que leurs dirigeants perpétuent avec cynisme ou inconscience. Une sorte de fatalisme qui permet à des dictatures de se maintenir en place. La progression et les succès de Daech leur donnent l’occasion de miser, ne serait-ce que pour quelques mois, sur une union tactique, objective, basée sur des principes simples mais efficaces pour barrer la route à cette armée qui tue, massacre, et poursuit son avancée dans les imaginaires de dizaines de milliers de jeunes venus de tous les continents pour faire le « djihad » au nom de qui, de quoi, peut-être un idéal, une échappée où ils renoncent volontairement à l’instinct de vie pour accepter celui de la mort, la leur et surtout celle des autres, des innocents. 

Dans l’Airbus russe qui a décollé de l’aéro­port de Charm el-Cheikh, il y avait une bombe. Daech voulait réagir aux frappes aériennes russes en Syrie. Poutine a bien reçu le message. Fin de la collaboration avec l’Égypte et arrêt des vols russes dans cette partie du pays. C’est ce que cherchait à provoquer le « calife » autoproclamé. Preuve de puissance et de stratégie bien étudiée. Ce sont de grands officiers de l’armée de Saddam qui sont derrière lui et qui prennent leur revanche après que le stupide et criminel G.W. Bush a démantelé cette armée en envahissant l’Irak. 

Le processus mis en œuvre par Daech ressemble à ces bombes qui, une fois larguées, se subdivisent à l’infini. Celles qui n’explosent pas immédiatement ­s’incrustent dans le sol et éclatent le jour où un enfant ou un adulte marche dessus. Elles s’appellent « bombes à sous-munitions » ; elles sont en principe interdites. 

Daech sème et se répand selon une technique imparable : quand ce n’est pas lui qui recrute, ce sont des jeunes qui renoncent à tout pour rejoindre ses rangs et offrir leur vie. Là réside la force exceptionnelle de ce mouvement que les menaces des Occidentaux indiffèrent. Pour battre Daech, il faut s’inspirer de ses méthodes, dupliquer sa stratégie, être face à lui sur le terrain et avoir des soldats qui auraient intériorisé le fait que leur guerre est une sorte de « djihad laïc », une guerre sèche et sans bavardage, sans sentiments. L’Occident en est incapable. C’est bien pour cela que les pays arabes devraient prendre les choses en main et débarrasser le monde de ce cancer. Il ne s’éteindra pas tout seul, quand bien même on lui ferait la morale en lui disant : « Ce n’est pas bien ! C’est l’islam que vous êtes en train d’assassiner et de jeter dans la marmite du fanatisme criminel. »

Le fait qu’une série d’attentats aient été perpétrés ces derniers temps (l’avion russe, la bombe dans un quartier chiite de Beyrouth, les attentats à Paris) peut s’expliquer par une perte de vitesse de Daech sur le terrain. Les bombardements des alliés ont probablement touché ses bases. En représailles, le « calife » a actionné le levier des commandos dormants. C’est là sa force. Car Daech a réussi ce qu’aucune armée au monde n’a pu faire : annuler la peur et rendre la mort désirable telle une fiancée qui promet le paradis. 

En regard, un grand travail reste à faire en Europe, dans les milieux de gens insoupçonnables, de « braves » types, même pas barbus, silencieux, courtois et discrets. Ils ont peut-être un millier de bombes prêtes à exploser. La traque doit être permanente et ne rien négliger.  

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