Cela commence par un couplet de Charles Trenet, « les enfants s’ennuient le dimanche / le dimanche les enfants s’ennuient »… Des gamins dévalent en criant les rues d’une bonne ville d’Auvergne, ça piaille comme une nuée de piafs. Qui mieux que François Truffaut a saisi dans son objectif l’énergie des petits, leur envie d’apprendre, leur émerveillement aussi, quand un instituteur tendre et généreux – incarné dans L’Argent de poche par Jean-François Stévenin – leur tend la main. Mais tout n’est pas si simple dans le cinéma de Truffaut. L’Enfant sauvage échoue à prononcer un autre mot que « lait », faute d’avoir été initié à temps au langage. Dans Les Quatre Cents Coups, le jeune Antoine Doinel, gavroche négligé, n’apprend pas ses leçons. Il sèche les cours et sèche son maître en lui jetant un matin au visage que sa mère est morte. Une idée saugrenue qui lui traverse l’esprit pour justifier une absence. Les instits de Truffaut sont pourtant de braves gens, modestes et consciencieux, les héritiers de ces fameux hussards de la République qui croyaient à l’école comme lieu d’égalisation et d’élévation. Dans ce cinéma, si les enfants souffrent, c’est moins de la sévérité des profs que du laxisme et de l’indifférence des parents. En classe on apprend ensemble, on est malheureux tout seul. Le petit Doinel / Jean-Pierre Léaud s’endort sur les bancs du fond, vide et ignare. Quand il s’échappe, c’est pour dérober une machine à écrire. À la recherche des mots qu’il n’a pas appris, de l’histoire qu’il va bientôt raconter. 

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