Les statistiques sur les migrants sont parmi les plus délicates à produire et sont régulièrement l’objet de polémiques acerbes. Le recensement des populations est une tâche qui prend un temps incompressible, pendant lequel les individus bougent, s’absentent, émigrent, immigrent. Tous ces phénomènes viennent lourdement perturber le décompte en train de se faire et biaiser les résultats de ce travail.

Il reste que l’immigration est mesurable : nombre d’immigrants vivent sur le territoire français depuis un certain temps, travaillent, envoient leurs enfants à l’école et répondent aux enquêtes de la statistique publique. L’Insee estime ainsi que 200 000 immigrés sont entrés chaque année sur le sol national entre 2004 et 2012. Les entrées en France auraient de plus augmenté de 2009 à 2012, en raison essentiellement de l’afflux d’Européens. Parallèlement, il faut bien sûr prendre en compte un certain nombre de sorties.

Dans ce paysage, l’Insee se garde toutefois d’aborder la question épineuse de l’immigration clandestine, sur laquelle il ne publie rien à notre connaissance. Les instruments de mesure disponibles sont donc myopes. Les seules estimations sérieuses se fondent sur des conjectures forcément fragiles, mobilisant des sources indirectes : nombre de placements en zone d’attente et de refus d’admission à la frontière, nombre de déboutés du droit d’asile ou de titres de séjour délivrés à des étrangers entrés irrégulièrement, nombre d’étrangers interpellés en situation irrégulière, de délits commis par des étrangers, de placements en centre de rétention administrative, et nombre de bénéficiaires de l’aide médicale d’État (AME) couvrant sous condition de ressources les étrangers en raison de leur situation irrégulière. 

Ces chiffres aboutissent à des estimations très diverses : les dernières commissions d’enquête au Sénat rendent compte d’estimations allant de 30 000 à plus de 100 000 migrants illégaux supplémentaires chaque année. Une fourchette très large au regard des 200 000 immigrés nouvellement entrés dénombrés par l’Insee. 

Vous avez aimé ? Partagez-le !