Avec Podemos en Espagne et Syriza en Grèce, la « déprivatisation » fait son entrée dans le vocabulaire politique. C’est plus moderne que « nationalisation », et ça fait moins peur. Mais il s’agit toujours de la même chose : le transfert à la collectivité de certains services ou activités. Le mot s’utilise aussi, de plus en plus, dans d’autres domaines. On s’interroge sur la déprivatisation de l’islam, de la maternité ou même de soi. Déjà, en 1995, dans Chevilles ouvrières (Éditions de l’Atelier), le sociologue Michel Verret analysait trois phénomènes qui, avouons-le, nous avaient échappé : la « déprivatisation de l’individualisation », la « resolidarisation déprivatisante » et « l’individualisation resocialisée ».

Le préfixe « dé- » est utilisé à longueur de journée pour donner un sens contraire à des mots. Débrancher, décentraliser, déboiser, décongeler, déranger… 

Et, comme si ce n’était pas suffisant, certains écrivains inventent des constructions négatives, à l’image de Gide qui notait le 22 avril 1905 dans son journal : « Si j’eusse été seul aujourd’hui, il me semble que je n’eusse pas désécrit de tout le jour. » 

Mais revenons à nos moutons, avec le préfixe « re- ». Supposons que la gauche radicale arrive au pouvoir et qu’elle déprivatise (renationalise) un certain nombre d’entreprises. Que se passerait-il si, quelques années plus tard, la droite gagnait à son tour les élections ? Une dérenationalisation ? Je m’en voudrais d’embrouiller le lecteur, cette  chronique n’ayant nullement pour objectif de désimplifier l’actualité. 

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