Statisticien, Andréas Georgiou est depuis près de dix ans au cœur d’un débat virulent : criminel pour les uns, il est un professionnel consciencieux pour les autres.

L’affaire commence le 4 octobre 2009, lorsque le socialiste Giórgos Papandréou devient Premier ministre. Il hérite à sa prise de fonction d’un budget voté avec un déficit à 3,7 %, peu crédible. De fait, la récession fait des ravages et le déficit de 2009 est sérieusement revu à la hausse – 13,6 % – en avril 2010. C’est cette révision majeure qui sera l’un des déclencheurs de la crise grecque, dont on sait qu’elle a menacé de faire exploser la zone euro.

Sous la pression de l’Union européenne et du Fonds monétaire international (FMI), le Premier ministre crée alors un nouvel institut statistique indépendant, Elstat, et nomme à sa tête Andréas Georgiou. Ce statisticien de bonne réputation a étudié aux États-Unis et fait carrière au FMI. En novembre 2010, il publie une nouvelle estimation du déficit de 2009, porté cette fois à 15,4 %, que valide Eurostat, la direction générale de la Commission européenne en charge de l’information statistique.

Bien que l’essentiel de la révision à la hausse ait été acté avant l’arrivée du statisticien, cette publication déclenche une contestation véhémente. Georgiou est accusé de trahir la Grèce et de noircir le tableau afin de justifier les efforts de rigueur exigés par les créanciers du pays – dont fait partie son ancien employeur, le FMI. En septembre 2011, une enquête judiciaire est diligentée sur le possible gonflement du déficit grec et Georgiou est accusé d’avoir coûté à la Grèce 171 milliards d’euros. Il démissionne en août 2015.

Poursuivi pour avoir nui à l’intérêt national, le directeur de l’agence officielle des statistiques est finalement condamné à deux ans de prison avec sursis en 2017. La peine est confirmée un an plus tard par la Cour suprême. Quelques années plus tôt, Andréas Georgiou avait eu l’occasion de livrer son commentaire dans le Financial Times : « On marche sur la tête. Ceux qui ont produit des statistiques maintes fois validées par les instances internationales sont poursuivis, alors qu’on laisse tranquille ceux qui sont responsables des chiffres falsifiés dans le passé. » 

 

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