Depuis 1990, la loi française reconnaît le viol entre époux. Cette « atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise » est même sanctionnée plus sévèrement pour un couple, pris au sens large (mariage, pacs ou concubinage) : jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle. Reste, bien sûr, à en prouver la réalité : entre acte consenti et acte subi, la frontière est mince quand il s’agit de l’intimité de deux personnes ayant choisi de vivre ensemble.

Le fameux devoir conjugal a-t-il disparu pour autant ? Pas du tout. S’il ne figure pas en tant que tel dans le Code civil, très pudique en matière de sexualité, l’article 215 (« les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie ») implique, selon les juristes, « une communauté de lit ». Tout en s’adaptant à l’évolution des mentalités, la législation porte encore la marque de l’ancien droit matrimonial catholique, fondé sur la procréation. Ainsi, la cour d’appel d’Amiens a prononcé en février 1996 un divorce aux torts exclusifs d’une épouse en raison de son « refus prolongé de la sexualité ». À l’inverse, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a condamné en mai 2011 un mari défaillant à verser 10 000 euros de dommages et intérêts à sa femme pour « violation grave et renouvelée des devoirs et obligations nés du mariage ».

Viol du conjoint et devoir conjugal ne font pas bon ménage. Jusqu’à quand la loi pourra-t-elle gérer en même temps l’agression physique et la pression morale, la violence des uns et l’abstinence des autres ? Ni trop ni trop peu : pour le moment, en matière sexuelle, les magistrats adoptent, si l’on peut dire, la position du juste milieu. 

 

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