Commençons par le commencement : le glyphosate est un herbicide. En tant que tel, il fait partie de la famille des pesticides, avec les fongicides (contre les champignons), les insecticides (contre les insectes) et les parasiticides (contre les vers). On voit que le glyphosate est seulement un parmi d’autres, mais le plus décrié. Le sujet est brûlant, passionnel. Une partie grandissante de l’opinion demande son interdiction immédiate. Une exigence qui laisse la majorité des agriculteurs désemparés. Comment faire ? Comment sortir rapidement d’un modèle agricole intensif, sommé de nourrir la population en produits normés et à bas coût ? C’est tout l’objet de ce numéro du 1.  

La focalisation sur le glyphosate est le premier élément notable. On ne parle que de lui, au point que ce nom est devenu synonyme du produit nocif que l’on disperse dans les champs, que l’on retrouve dans nos assiettes et qui finit à dose plus ou moins forte dans nos vessies… « J’ai du glyphosate dans les urines, et toi ? » : tel est le slogan horrifique de la campagne des militants antipesticides. Dernier rebondissement en date, une quarantaine de personnes ont porté plainte le 13 février dernier, à Toulouse, pour mise en danger de la vie d’autrui, en se fondant sur la présence de traces de glyphosate dans leurs urines. À ce stade de la mobilisation, on finit par oublier que la panoplie chimique de l’agriculteur moyen propose bien d’autres articles… À commencer par les herbicides à base de soufre, qui sont les plus vendus en France.

En réalité, la prise de conscience du danger potentiel du glyphosate en particulier et des pesticides en général est partagée par les consommateurs et le monde agricole. Les agriculteurs sont par définition en première ligne. Ce sont eux qui manipulent le produit et le respirent. En 2015, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a déclaré « improbable » que le glyphosate puisse provoquer des cancers ; la même année, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a estimé que ce désherbant possède un caractère « cancérogène probable ». Cherchez l’erreur ! Un doute est né, le soupçon contre son fabricant Monsanto a fait le reste.

Mais un claquement de doigts ne suffira pas à changer la manière de travailler la terre. Le passage de la production intensive au bio, du marché mondialisé au marché local, de l’agriculture industrielle à l’agroécologie ne se décrète pas. Le changement de modèle doit faire l’objet d’une pédagogie, non d’anathèmes. Il faut en somme embarquer dans l’aventure les paysans et les citadins, les producteurs et les consommateurs. Faire partager une conviction et fixer un horizon. C’est ainsi que la véritable addiction aux pesticides pourra être soignée.  

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