Donald Trump est un pitre. Les exemples de ses singeries se multiplient et le verdict est sans appel. Mais qu’un tel pitre dispose, entre autres, d’un bouton nucléaire qu’il vante être « beaucoup plus grand et plus puissant » (sic !) que celui de son confrère nord-coréen – « une personnalité remarquable… un gars marrant… il aime son peuple » (re-sic !), « et mon Bouton fonctionne » (re-re-sic !) – pousse à s’interroger sur à sa délicieuse personnalité et sa psychopathologie manifeste. 

Tout d’abord, la quasi-totalité de ses collaborateurs présents et passés s’accordent pour décrire comme très courte la durée d’attention dont semble capable le quarante-cinquième président des États-Unis. Troubles neurologiques ? Troubles psychiques ? Avec, en supplément, un brin de sénilité ? Les trois sont possibles et ne sont en rien exclusifs. De même, sa grande difficulté à lire est documentée par plusieurs incidents dont existent des vidéos. Enfin, ses discours, largement improvisés devant des publics acquis à sa cause montrent comment ses capacités cognitives – non sequitur après non sequitur – implosent régulièrement, donnant lieu à des instants d’inintelligible non-sens. La chose atteint une telle ampleur que Donald Trump semble parfois rien moins que délirer.

Quelles que soient les causalités neuropsychiatriques responsables de ces désordres spécifiques, le spectacle quasi permanent que Trump donne de lui-même avec une profonde jouissance permet, sans risque de se tromper beaucoup, d’entrevoir les fantômes qui le hantent.

A minima, Trump est un pervers narcissique. Il l’est gravement et cela signifie que rien d’autre n’importera jamais à Donald que Donald lui-même. Ce n’est pas simplement d’une extraordinaire prétention dont il s’agit ici, mais plutôt d’une radicale incapacité à concevoir qu’il existe, en ce monde, d’autres sujets que lui-même et le flux constant de ses seuls désirs. Pour Trump, comme pour tout pervers narcissique grave, lui seul existe réellement. Les Autres, les événements, les hasards de l’existence ne lui sont jamais que l’occasion de tenter une nouvelle fois – toujours la même – de se regarder au miroir. Image que, malgré tous ses efforts et sa permanente frénésie, il ne parvient jamais à contempler. Et c’est là toute la différence entre le Narcisse du mythe et le pervers narcissique de notre taxinomie. Le Narcisse mythique voit fort bien son image. Il la voit même tellement bien qu’elle le fascine et que, tentant de s’en rapprocher, il tombe dans l’eau et se noie. Le pervers narcissique, lui, en cherchant furieusement à se rattraper et à s’atteindre enfin, court et court et court sans cesse. Mais ses efforts toujours resteront vains pour une raison simple : il ne se rattrapera jamais parce qu’il n’est rien à rattraper. Contrairement au Narcisse mythique, il ne se noiera pas dans sa propre image, car tout son drame est précisément d’être incapable de se représenter la nature même de cette image. Simplement, il mourra un jour, épuisé d’avoir passé son existence à poursuivre son insignifiante version de néant. Ainsi Trump, de revirements incontrôlés en gestuelles clownesques, ne sera jamais autre chose qu’une sorte de hamster s’agitant sans fin dans sa roue, à l’impossible poursuite de sa propre évanescence. 

Mais il y a pire… Perpétuellement humilié par ce réel qui toujours se dérobe à la pensée magique de ses exigences et de ses fantasmes, Trump, déjà paranoïde, a toutes les chances de devenir, l’un de ces jours, franchement paranoïaque. Si ce n’est déjà le cas. 

Vous avez aimé ? Partagez-le !