Avec son passé soviétique, la Russie fait partie de ces pays centralisateurs et planificateurs qui héritent d’une tradition puissante du chiffre. Les évolutions des statistiques démographiques ne pouvaient donc passer inaperçues : la population décroît et la « Grande Russie » est inquiète. L’Institut de statistique russe prévoit que la Russie ne comptera plus que 130 millions d’habitants en 2030, contre 143 millions en 2010 (et 148 millions en 1993, point maximum) si les tendances actuelles devaient perdurer.

La Russie subit les conséquences conjuguées d’une natalité en berne et d’une espérance de vie parmi les plus basses d’Europe, toutes deux en nette dégradation après la dislocation de l’URSS. L’espérance de vie n’était que de 58 ans pour les hommes durant la décennie 1995-2005. La désorganisation du pays, le désespoir de la population et l’alcoolisme endémique expliquaient alors ce niveau voisin de celui de la France au milieu du xxe siècle. Mais depuis les années 2000, un discours alarmiste est tenu simultanément par le pouvoir politique, les autorités religieuses et les médias. (« Quand la Russie disparaîtra – enquête sur un désastre démographique », titrait la Nezavissimaya Gazeta en 2011.) Ce thème d’une crise démographique majeure s’invite désormais régulièrement dans les allocutions de Vladimir Poutine. Une politique nataliste volontariste et la revalorisation de la famille traditionnelle sont à l’ordre du jour. L’espérance de vie des hommes amorce une sensible amélioration et s’établit à 65 ans en raison de la lutte contre l’alcoolisme et de la stabilité assurée par le gouvernement.

Aujourd’hui, c’est surtout l’immigration, en grande majorité en provenance des pays de l’ex-URSS, qui permet d’atténuer le déclin démographique, en compensant pour moitié la contraction de la population russe. Au prix d’autres discours anxiogènes et attitudes xénophobes.

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