Il est resté une odeur dans les plantations :
un amalgame de sang et de corps, un pétale nauséabond et pénétrant.
Parmi les cocotiers les tombes sont remplies
de squelettes brisés, de râles silencieux.
Le délicat satrape
converse avec des coupes, des cols, des cordons dorés.
Le petit palais luit comme une horloge
et les rires véloces et gantés
traversant parfois les couloirs
viennent rejoindre les voix mortes
et les bouches bleues fraîches enterrées.
Les pleurs sont là cachés comme une plante
qui s’égrène inlassable sur le sol
et dans la nuit éploie ses grands thyrses aveugles.
La haine s’est formée écaille par écaille
et coup à coup, dans l’eau terrible du marais,
avec un mufle plein de vase et de silence.

Pablo Neruda rédige en clandestinité son Chant général. Le poète chilien y chante son continent et ses martyrs contre les dictateurs et les puissances de l’argent. Que d’images pour opposer l’engrais silencieux de la chair à la mécanique du pouvoir. Parfois, après la pluie, ne vient pas le beau temps mais un autre déluge. 

 

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