Coup sur coup, deux informations viennent d’être portées à notre connaissance. La première nous apprend que Facebook porterait de 10 000 à 23 000 le nombre de ses salariés dédiés à la traque des fake news que se partagent ses deux milliards d’amis. La seconde, plus bouffonne, signale que le 45e président des États-Unis s’est fait, dans un tweet, l’agent de communication d’un nouveau prix, les « Fake News Awards », dont le seul but est de discréditer des médias comme le New York Times ou CNN. On n’en finit plus d’être médusé par la capacité de Donald Trump à inverser l’échelle des valeurs communes, à se moquer de tout et d’abord de la vérité des faits.

Pour mesurer l’impact et la nouveauté des fake news, il faut bien saisir leur nature. Il s’agit d’informations mensongères fabriquées par des individus, des mouvements ou des puissances étrangères. Une fois le message conçu, il est propulsé simultanément dans le grand bouillon numérique par des comptes malveillants – relayés par d’autres comptes automatisés – pour surfer sur la grande vague du buzz. Les réseaux sociaux fonctionnent alors comme un immense accélérateur à bobards et illusions conspirationnistes. Le lynchage devient planétaire ; la campagne de presse se transmue en fatwa haineuse. Le réel disparaît devant l’émotion, la raison critique devant le règne de l’opinion. De fait, une récente étude IFOP réalisée pour la Fondation Jean-Jaurès indique qu’un Français sur quatre est imprégné de thèses loufoques, genre « la Terre n’est pas ronde ».

Que faire ? Il existe trois pistes selon les experts consultés dans ce numéro. La première, de long terme, est celle de l’éducation. Cela suppose la capacité d’apprendre aux élèves, dès le plus jeune âge, à lire en permanence avec un sens critique, à décoder les images, à penser contre ses intuitions puisque nos réflexes intellectuels nous portent souvent à l’erreur. Vaste programme ! La deuxième piste, de moyen terme, consisterait pour l’Union européenne à négocier avec Facebook, Twitter & Co. afin d’obtenir que ces réseaux sociaux renoncent à une partie substantielle de leurs revenus publicitaires en désactivant les comptes pourvoyeurs de fake news. On ne sache pas que ces discussions aient commencé. Enfin, il existe la possibilité, au niveau national, de légiférer. C’est ce que propose Emmanuel Macron avec l’objectif de mettre un terme aux fake news durant les périodes de campagnes électorales. Ce n’est pas inutile puisqu’il est quasi impossible d’agir actuellement devant les tribunaux dans ce domaine. Le projet de loi, encore dans les limbes, est contesté sur les réseaux sociaux. Mais, à ce stade, il serait grave de renoncer à casser le ventilateur à fausses nouvelles. 

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