La France est une puissance militaire qui compte.

  • Elle est engagée dans une douzaine d’opérations militaires extérieures (OPEX) et d’interventions placées sous mandat des Nations unies ou de l’Union européenne, ou en application d’accords bilatéraux de défense.
  • Elle déploie depuis 2015 autant de soldats sur le territoire national qu’en OPEX, pour protéger et rassurer les citoyens (opération Sentinelle). 
  •  Elle dispose d’une force de dissuasion nucléaire à deux composantes (océanique et aérienne) qui lui assure une indépendance stratégique et explique en partie, avec sa capacité d’initiative diplomatique, qu’elle soit membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies.
  • Elle consacre 162 milliards d’euros à sa défense (2015-2019), ce qui représente 1,78 % du PIB (contre 2,38 % en Grèce, 2,21 % au Royaume-Uni, 1,19 % en Allemagne et 3,61 % aux États-Unis). Ce budget est en hausse constante depuis juillet 2015 et il existe un consensus politique pour le hausser à 2 % d’ici trois à cinq ans, ce qui équivaut à 6 à 8 milliards d’euros de plus par an.
  • Elle assure, par sa présence, sa souveraineté dans ses territoires d’outre-mer et ses vastes domaines maritimes.
  • Elle est membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord et promeut des scénarios de défense européenne.

Les armées soulignent le degré élevé d’engagement des forces sur les théâtres extérieurs depuis 2011, et national, depuis 2015. Dans un contexte international critique, ce constat les pousse à plaider pour un accroissement de leurs moyens.

Les points forts sont majoritaires dans les cinq systèmes de forces. La France est indépendante dans des domaines cruciaux. 

  • D’abord, la dissuasion nucléaire, avec ses deux composantes : 

– océanique : la Force océanique stratégique (FOST) avec ses quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) ;

– aéroportée : les Rafale équipés de missiles air-sol moyenne portée (ASMP). 

  • Ensuite, dans le domaine du commandement et de la maîtrise de l’information (radar, chiffrement, renseignement satellitaire) et dans la production numérique d’images géographiques via l’observation spatiale optique (Helios II). 
  • Pour l’engagement et le combat, elle dispose de sous-marins nucléaires d’attaque (SNA). De plus, une nouvelle génération, celle des Barracuda, sera mise en service en 2018.
  • Pour la protection et la sauvegarde des approches maritimes, elle peut s’appuyer sur les nouvelles frégates multimissions (FREMM).

Les points faibles sont peu nombreux mais cruciaux. 

  • Le système de forces dit de projection, mobilité, soutien est insuffisant. Le manque de moyens de transport aérien lourd contraint à louer les Antonov de compagnies privées de Biélorussie, d’Ukraine et de Russie, ainsi qu’à acheter des Lockheed C-130 Hercules aux États-Unis, en attendant que les gros-porteurs européens quadrimoteurs A400 M (Airbus), affectés de gros retards de mise au point, soient opérationnels (sept pays sont parties prenantes de ce projet). Le ravitaillement en vol est assuré par des C-135, vieux de cinquante-deux ans, mais huit ravitailleurs MRTT (multi role tanker transport) Airbus A330 doivent être livrés en 2018. Les forces terrestres en opération utilisent encore des VAB (véhicules de l’avant blindé) datant d’il y a quarante ans. Les véhicules blindés sont le fer de lance des OPEX. L’armée en perd un par semaine, touché par des engins explosifs improvisés ou des mines. Pour se prémunir, il faut alourdir le poids des véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) à 32 tonnes. 
  • Les technologies de communication dites ISR (intelligence, surveillance, reconnaissance), indispensables en opération, sont souvent importées des États-Unis, de même que les drones HALE (haute altitude-longue endurance), comme les Reaper. Les drones Harfang sont une coproduction franco-israélienne. 
  • Enfin, le porte-avions Charles de Gaulle est pour 18 mois en arrêt technique majeur. L’état-major ne peut donc recourir à l’atout de son groupe aéronaval dans la gestion des crises. 

La France achète chaque année pour 500 millions d’euros de matériel militaire aux États-Unis et reste dépendante de la Californie et de Taïwan pour l’acquisition de technologies critiques (logiciels, matériaux et composants). 

Dans un avenir proche (2017-2022), des choix devront être faits : engagement des dépenses d’études de remplacement des 5 SNLE, d’ici 2030, et des missiles (soit 3 à 6 milliards d’euros par an) ; études pour la construction d’un deuxième porte-avions (sans les Britanniques, qui ont finalement opté pour des avions F-35 à décollage et atterrissage différents de celui des Rafale Marine) ; accélération du programme Scorpion de modernisation des équipements de l’armée de terre car le coût d’entretien des matériels vieillis est exorbitant (dans les OPEX, l’armée consomme bien plus vite qu’elle ne régénère ses équipements). La France dépend donc de plus en plus de ses exportations d’armement pour maintenir les chaînes de production nationales (17 milliards d’euros, dont les trois quarts au Moyen-Orient).

Quelques voies de coopération existent. 

  • La première est la réalisation d’équipements en commun : A400M, hélicoptères Tigre et NH90, frégates Horizon et multimissions, missiles. Des accords bilatéraux de production ont été signés en mars 2017 avec Londres d’une part pour des missiles et d’autre part entre Nexter et l’allemand KMW pour les blindés ; des projets associant Paris, Berlin et Rome existent depuis 2016 pour les drones MALE (moyenne altitude-longue endurance) européens. 
  • Des moyens sont mutualisés entre la France, l’Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas qui ont créé un commandement européen de transport aérien, basé à Maastricht. Ce secteur du transport mutualisé est appelé à se développer.
  • On peut également renoncer à acquérir en propre certaines capacités et bénéficier de celles des partenaires. La France peut accéder aux données fournies par les satellites d’observation radar de l’Italie et de l’Allemagne, qui ont accès aux images du satellite Helios II.

Un fonds européen de défense a été proposé par Thierry Breton et a reçu un bon accueil à Berlin lors de la visite du président Macron. Mais les besoins des armées nationales ne sont pas harmonisés. L’absence de standardisation pèse sur les coûts. La concurrence systématique entre producteurs européens et l’orgueil des ingénieurs complètent le tableau, ce qui profite au lobby américain.

Entre le souhaitable et le possible, les options d’équipement des forces dépendent en dernier recours des décisions du président de la République, chef des armées, et de l’extension des périmètres géographiques où il entend contribuer à la stabilisation des régions en crise, hors de la protection du territoire national.  

 

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