Parce que je suis persuadé que les sondages peuvent être démentis ; parce que je ne me résigne pas à la défaite annoncée de la gauche ; parce que je refuse de baisser les bras : j’ai décidé d’être candidat à la présidence de la République.

Au journaliste qui voulait savoir ce qui me différencie des onze ou douze autres postulants de gauche déjà déclarés, j’ai répondu : « Moi, je veux rassembler et faire changer les choses. » J’ai aussitôt perçu beaucoup d’intérêt chez mon intervieweur. « Oui, il faut changer, chan-ger », ai-je martelé. Il a noté le verbe en lettres capitales dans son carnet, puis l’a souligné trois fois. J’ai su, à ce moment-là, que c’était gagné. Certes, il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, comme dit mon beau-frère Jojo, mais je ne peux m’empêcher de réfléchir déjà à la composition de mon futur gouvernement.

J’avais cru à un moment que Jojo allait lui-même se présenter à la présidentielle, comme notre voisine du cinquième étage, qui hésite encore. Mais il y a renoncé et, très gentiment, s’est proposé pour coller mes affiches électorales. « Attention, m’a-t-il dit hier soir au téléphone : ils sont tous en train de copier sur toi. Je n’arrête pas de coller des “changer” sur des affiches concurrentes qui appellent au changement. Même les candidats les plus conservateurs veulent renverser la table. Nous sommes vraiment dans un pays révolutionnaire ! »

Je l’ai rassuré. Si je n’ai plus l’exclusivité du changement, eh bien, je changerai mon fusil d’épaule : j’axerai toute ma campagne sur le rassemblement. 

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