Sur sa photo de profil, elle sourit à l’objectif, un nœud rose pâle dans ses longs cheveux châtains. Devant elle, sur un petit bureau en bois, sont posés une poupée et un manuel scolaire. Bana Al-Abed a sept ans et survit à Alep-Est. Depuis trois mois, aidée de sa mère Fatemah, elle publie quotidiennement sur Twitter des nouvelles de l’enfer en anglais : « Bonjour planète, je suis heureuse d’être en vie après la pluie de bombes tombée toute la nuit » ; annonçant à ses followers avoir perdu une dent de lait : « La petite souris a peur des bombardements, elle s’est réfugiée dans son trou. Quand la guerre prendra fin, elle viendra. » Et sous la photo de deux écolières mortes, ensanglantées et emmaillotées dans des couvertures grises : « Je pleure. C’est arrivé aujourd’hui #Syrie. » Suivie par 230 000 personnes, Bana a suscité l’empathie de twittos du monde entier. Des anonymes, notamment de France, lui envoient des photos et des messages de soutien auxquels elle répond de la même manière.

La romancière britannique J.K. Rowling, interpellée directement par la fillette, lui a fait parvenir l’intégralité des tomes de Harry Potter en version digitale. Mais Bana a également des ennemis. La maîtrise parfaite des réseaux sociaux et de l’anglais par sa mère a éveillé les soupçons et la haine de twittos pro-Assad et pro-Russes. Ils accusent cette dernière d’être la femme d’un djihadiste, ou d’être tout bonnement le fruit d’une opération de propagande américaine. Contactée via Skype par le journal britannique The Guardian, Fatemah a déclaré, par-dessus le bruit des bombes : « Ils pensent que les assiégés sont des terroristes, et comme vous pouvez le voir, nous sommes des gens normaux. Nous sommes syriens, nous sommes les habitants d’Alep. » 

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