En décembre 2010, un journaliste avait demandé à François Hollande s’il ne manquait pas de « mordant », s’il n’était pas « trop gentil » pour s’engager dans la bataille présidentielle. Le futur chef de l’État avait répondu : « Moi, je ne suis pas pour prendre au collet mes adversaires, pour les clouer à un croc de boucher. Est-ce que je suis normal ? Oui. Et je vais vous dire : je pense que le temps d’un président normal est venu. »

L’expression allait devenir sa marque de fabrique. Finis les gestes de Superman, les sorties de route et le bling-bling. Hollande serait l’anti--Sarkozy.

Efficace pendant la campagne électorale, l’adjectif « normal » a été de plus en plus gênant à l’Élysée. Impossible de s’en débarrasser. Il lui colle à la peau, comme le sparadrap du Capitaine Haddock. Tout ce qu’il dit, tout ce qu’il fait, est jaugé en fonction de ce qualificatif ambigu.

Normal signifie-t-il moyen, ordinaire, conforme au modèle courant ? Désigne-t-il plutôt quelqu’un de prévisible et de régulier ? Ou est-ce un homme sain, qui ne présente pas de patho-logie particulière ?

En se comportant de manière insolite (le scooter, les confidences aux journalistes…), l’anti--Sarkozy est sorti des clous. Cela lui a coûté encore plus cher que ses changements de ligne. Il aurait pu s’inspirer de Georges Pompidou : après les envolées exceptionnelles du général de Gaulle, l’homme de Montboudif, carré dans un corps rond, la cigarette au bec, avait su faire atterrir la France sans écorner la fonction. On oubliait que ce président normal, aux airs de Monsieur Tout-le-Monde, était normalien.

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